Extrait du journal

— Soit donc, dit-elle avec dureté, que m’importe, après tout! Elle enlève son capuchon et découvre sa figure pâle. La souffrance, en ces derniers jours, y a imprimé une vieillesse précoce. Les traits dénoncent la fatigue et toujours les yeux brillent, animés par la fièvre de sa colère et de sa jalousie. — Soit... je suis madame de Montbriand. De quel droit m’interrogez-vous?... De quel droit m’arrétez-vous ? — Parce que je vous rencontre seule, la nuit, dans une ville que vous connaissez à peine. — Le beau prétexte ! Vous me suivez de puis un quart d’heure. Pourquoi ? — Parce qu’il m’a semblé que vous êtes en une surexcitation dangereuse et parce que j’ai cru que vous pourriez avoir besoin d’un ami profondément dévoué et respec tueux, pour vous défendre... — Pour me défendre?... De quoi suis-je menacée ? — D’un grand malheur, si vous écoutez votre haine. Elle eut un rire nerveux et tout de suite répliqua : — J’ai tort de me cacher. J'ai le droit de haïr... Vous ne prévoyez qu’un malheur... eh bien! je vous dis, moi, que vous pou vez prévoir un crime... — Je vous en supplie, madame, revenez à vous... — Vous vous dites que je suis folle... quelle erreur! Suivez-moi, vous verrez... Il refuse. C’est elle qui l’entraîne, en le tenant par la main, lui serrant les doigts avec une vigueur d’homme... Dans la rue qu’ils longent, de rares ma gasins sont encore ouverts, mais un à un,...