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La Petite Gironde, 2 septembre 1915

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La Petite Gironde
2 septembre 1915


Extrait du journal

Et je les ai pris au vol, en effet, ici ou là-bas, ces traits épars d’une effigie que je ne pensais pas alors avoir un jour à fixer. Je les ai cueillis sans même faire attention au travail inconscient de ma fidèle servan te, la mémoire, qui les enregistrait, qui em magasinait dans ses tiroirs tous ces clichés hâtifs. Et voici qu'aujourd’hui, à mon pre mier appel, elle ouvre ses tiroirs, dévelop pe les clichés, me les offre pêle-mêle, en vrac. Je n’ai qu’à feuilleter les épreuves, toutes tirées, et combien expressives. Deux petites apprenties, de douze à qua torze ans, admirent une grande chromo, fortement enluminée, parmi d’autres qui transforment la devanture close d’une bou tique en exposition de tableaux, à cinq sous les plus riches. — Hein 1 dit l’une, crois-tu qu’il n’a pas l’air commode, avec ses gros sourcils 1 Ça lui fait comme deux paires de moustaches. — Oui, répond la plus jeune ; mais sous les moustaches d'en haut, regarde ses yeux, ce qu’ils sont malins. — C’est vrai, reprend la première. Ma lins, et puis bons aussi... Je n'avhis pas bien vu. — N’est-ce pas? ajouta la moniignarde. Des petits yeux d’éléphant. — Oui, conclut la grande, d’un éléphant qui serait en même temps un caniche. Dans une ambulance, un blessé me conte la bataille de la Marne, la volte-face d’offensive après la dure et longue retraite depuis le Nord. Il n’en revient pas encore d’avoir reculé tant et tant de jours, sans trouver qu’on avait tort, puis d’avoir repris du poil de la bête en trouvant que c’était tout naturel. — Dame ! fait-il, puisqu’il l'avait vu et voulu ainsi, c’est que ça devait être com me ça. Il connaît joliment son affaire, allez! Et, sur cette même bataille de la Marne, ce détail, certifié par un autre soldat, un sergent qui est toujours au front, et qui affirmait tenir ce détail d’un automobiliste, conducteur, ce iour-là, d'un officier do liaison. L’ordre du grand chef aurait été identique, porté à tous les autres grands chefs d’armée,, et cet ordre disait : — Attaquez ! Encore et toujours 1 atta quez. — Mais si mes hommes flanchent? — Attaquez quand même. — Et s’il ne m’en reste plus? — Attaquez ! Attaquez ! Celui-ci est un combattant de 70, qui a quatre fils au feu. qui ne s’en plaint pas, et qui en donne cette raison : — Je suis tranquille : ils sont menés par quelqu’un qui sait où il va. Ah ! si nous avions eu son pareil à Metz, dans le temps I...

À propos

Au début simple déclinaison à prix modique du journal La Gironde, La Petite Gironde devient de plus en plus autonome à la fin des années 1880, lorsque sa diffusion dépasse – et de très loin – celle de son vaisseau-mère pour atteindre les 200 000 exemplaires à l'orée de 1914. Centriste modérée à l'origine, sa ligne éditorialse se droitise au fil des ans, jusqu'à devenir proche de celle de L'Action française dans l'agitation de la Première Guerre mondiale. Sans surprise, le journal sera collaborationniste en 1940, puis interdit en août 1944.

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