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La République française, 22 avril 1874

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La République française
22 avril 1874


Extrait du journal

et arrogants. Non, ce n’est pas le senti ment de la revanche qui nous délie au jourd’hui la langue ; c’est plutôt celui de l'effroi, non plus seulement pour nous, qui restons, presque sans défense, ex posés aux premiers coups, puisque nous sommes « l’ennemi héréditaire », mais surtout pour tous ceux que menace la nouvelle Allemagne qui apparait aujourd’hui à l’Europe. Cette Allemagne si puissante et si dure, qui semble disposée à violenter même la fortune, dont elle a épuisé tou tes les faveurs, est-elle donc si effrayante? Hé oui ! nous savons bien que les der nières discussions du Parlement fédéral ont livré le secret du malaise profond et inévitable dont souffrent déjà nos vainqueurs. Nous savons bien que les populations, que leurs représentants ne supportent pas sans gémir le joug de fer imposé à leurs intérêts, comme à leurs habitudes, par l’ambition immodé rée de la royauté et de l'aristocratie prussiennes. La Prusse a grandi par la guerre. Elle ne voit que la guerre qui puisse la grandir encore. Le chef de la maison de Hoheuzollern pense là - dessus comme ses amis personnels du parti militaire et de la noblesse féodale. M. de Bismarck, avec sa rare saeaeité, ne partage point à un égal degré tous les entraînements de son roi et de ceux qui l’entourent. Plus pénétré de l’esprit moderne, en rap ports plus lréquenis avec les hommes ac courus de tous les point de l’Allemagne pour siéger dans le Parlement, l’habile chancelier ne voudrait pas heurter trop de front les traditions et les besoins d’une race toute pacifique. 11 cher che les tempéraments. 11 tourne les difficultés. 11 invente des compro mis, et, pour les faire accepter, pour les faire réussir, il va jus qu’à risquer sa propre démission. Avec son expérience, sa pénétration des choses et des hommes, M. de Bismarck n’ignore pas que, dans notre temps, il importe de ne point dépouiller tout à fait les Parlements de ce qu’ils con sidèrent comme lo plus précieux de leurs droits, le vote des impôts, et du plus onéreux de tous, l’im pôt du sang; que les peuples s’in quiètent d’abord, et ne tardent pas à s’irriter de perdre peu à peu la libre disposition de leur sang et de leurs trésors ; enfin, qu’à froisser aussi cruel lement les populations les plus dévouées et les mieux disposées à se laisser conduire, on risque de laisser dans leur cœur des germes d’insubordination et d’aigreur qui. tôt ou tard, se lèvent et disjoignent les pierres d’un édifice qui a coûté tant de peines à construire. Le fondateur de l’unité allemande est main tenant aux prises avec les difficultés de son œuvre. 11 a triomphé de ses derniers embarras, mais au prix de quels efforts! Tout cela est vrai, mais la France et l’Europe n'en doivent pas moins rester attentives à l’élaboration de cette unité germanique que l’on nous annonce com me définitive et que l’on nous présente...

À propos

Face à une gauche qui ne parvient pas à contenir ses partisans, Léon Gambetta entend rassembler une majorité de républicains autour d’un nouveau quotidien, organe de l’Union Républicaine : La République française. Grand journal à 15 centimes, il consacre une part importante de son contenu aux nouvelles de province et joue un rôle considérable dans la victoire des républicains contre les conservateurs. La mort de Gambetta provoque de facto un infléchissement de la publication qui s’éteint lentement jusqu’en 1931.

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