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La République française, 2 novembre 1888

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La République française
2 novembre 1888


Extrait du journal

Est-ce l’Angleterre ? Mais les viticul teurs italiens ont tàté le terrain, et voici la mésaventure qui leur est arrivée. Les Anglais, en gens pratiques, ont voulu, avant d’acheter les vins d’Italie, être ren seignés sur leur valeur et leur qualité. C’est la Gazette pie'montaise qui rap porte le fait. Voici ce qu’on lit, en effet, dans ce jour nal sous le titre : « Nos vins à Londres. » « Un jury avait été chargé de déguster nos vins italiens ; il avait pour président M. NV. Hudson. Voici ce qu’il a déclaré : « A » peine avions-nous commencé à gofc» ter, que de suite on vit qu’une grande » quantité des vins étaient plus ou moins » entrés en fermentation. Pour cette rai» son, nous avons résolu de mettre hors » concours chacun de ceux qui n’étaient > pas marchands, tournés ou invenda» blés. » Et la conclusion du jury est celle-ci : « Qu’il considère que les vins italiens ne sont d’aucun placement sur le marché anglais et que même ils ont peu dé chance sur les autres. » Nous n’avons, ajoute-t-il, ni le climat, ni la place, ni l’habileté technique pour soigner le vin lorsqu’il est embarqué grossièrement et sans soins afin de le sauver s’il tourne mal. Voilà pour l’Angleterre. Passons à la Suisse. Le Journal de Genève, il y a quel que temps, publiait les lignes suivantes sous ce titre : « les Vins italiens » : La Suisse est actuellement envahie par les vins italiens. Les producteurs de la péninsule, ne pou vant plus exporter en France et devant à tout prix vider leurs vases pour pouvoir encaver la nouvelle récolte, se jettent sur la Suisse. On vend, à l’heure qu’il est, en gros, l’hectolitre de vin rouge, franco de port et douanes en gare de Berne, à 24 francs. On cite des marchés faits sur place, en Italie, à 5 et 6 centimes le litre. C'est dire que les inter médiaires réalisent un joli bénéfice si leurs vins arrivent en bon état, ce qui n’est pas toujours le cas. D’autre part, le public ne s'est pas encore habi tué au goût particulier des vins de nos voisins et, malgré leur bas prix, la consommation n’est pas encore aussi forte qu’on pouvait le craindre. D’après d autres renseignements, l’origine de cette inondation serait due précisément au fait que les douanes françaises ont découvert que, pour éviter de payer les droits élevés dont ils sont frappés, on les faisait passer par la Suisse comme produits autrichiens et roumains. Toutes les consignations ont été retournées. Il en résulte que, plutôt" que de payer les frais de retour, des milliers de barriques sont en ce mo ment accumulées dans toute l’étendue de la Suisse. Une grande quantité de ces vins vient d’arriver à Lucerne ; le contenu en est débité sur les trucks à la station à quinze centimes le quart. A Genève et dans d’autres villes, on est aussi encombré des vins de même provenance. La France constituait leur principal marché. L’Alle magne, en dépit de l’amitié qu'elle professe pour l’Italie, frappe ses produits vinicoles de droits encore plus élevés. Si l’on n’arrive pas à conclure un arrangement, il faut s'attendre à la ruine de tous les vignerons italiens qui se consacrent ex clusivement à la production des vins de coupage. La Riforma, sans cloute, va s’écrier que le Journal de Genève est inféodé à la France et récuser son témoignage. Eh bien ! nous allons lui en présenter un autre, et officiel, cette fois. Il s’agit d’une lettre adressée par M. Tondury, avocat à Zurich, vice-consul italien, consul de Portugal, au consul d’Italie à Zurich. Cette lettre, envoyée à Rome par le con sul, a été insérée au Bulletin des nou velles commerciales du ministère du com merce, de l’agriculture et de l’industrie du royaume d’Italie à Rome,le 18 septem bre dernier, n" 38. La Riforma a négligé de l’y aller cher cher, mais d’autres l’y ont découverte et la très vaillante chambre de commerce française de Milan la publie dans son bulletin mensuel. La voici et nous la recommandons aux méditations de la Riforma : Comme, dans l’exercice de ma profession, j’ai souvent des rapports avec des négociants en vins, j’ai eu dernièrement l’occasion de faire des observations sur les funestes conséquences et les dommages immenses qui résultent pour le com merce italien des relations actuelles italo-franaises, par suite de la non-existence d’un traité de commerce entre les deux pays, motif pour lequel la France est actuellement fermée aux vins ita liens. Je me limiterai à citer quelques faits qui peutêtre intéresseront votre consulat et le gouverne ment royal. Un bon vin de Barletta valait avant l'état de choses actuel 45 à 60 francs franco Zurich. Un bon vin de table piémontais ou toscan valait de 35 à 40 francs franco Zurich, ces conditions, bien entendu, par wagon complet. — Ces prix corres pondaient parfaitement à ceux des vins suisses, hongrois et autres qui se consomment dans ce pays. Maintenant, les vins italiens ont souffert une dépréciation énorme, les maisons italiennes ont fait en Suisse des envois considérables de vins, lesquels sont pour ainsi dire invendables et se cèdent à tous les prix. La maison F. A., d’un pays sur le lac de Garde, a été obligée de céder une partie de vin qu’elle avait à Zurich, et qui en temps ordinaire aurait valu 45 francs l’hectolitre, a 27 francs franco Zurich ! D’autres de mes clients, MM. R. et G., de Gènes, ont vendu une partie de vin de Sicile au prix de 25 francs franco Aarau, alors que cette marchandise leur coûtait 41 francs. Dans les divers dépôts de Genève, on assure qu'il y actuellement environ 1,000 fûts de vin italien qui ne trouvent pas d’acheteurs et que l’on vend au prix de 22 à 25 fr. par hectolitre. Une maison de Barletta qui avait à la station de Zu rich une partie de 27 fûts de vin de première qualité a dù les céder à 30 fr. franco Zurich. La même maison offre inutilement 50 autres fûts qui se trouvent ici, sans pouvoir trouver des acheteurs, car ceux-ci ont presque tous pro filé de la grande dépréciation et ne savent plus où loger le vin par suite du manque de réci pients. H est naturel que les négociants suisses, étant de cette manière fournis des bons vins à des prix vils, feront un beau profit. — Le commerce ita lien souffre énormément de cette situation ; pour cette raison, je me permets de vous faire con naître les faits ci-dessus exposés, vous autorisant à en taire l’usage que vous croirez. Tels sont les nouveaux et heureux dé bouchés qui s’ouvrent chaque jour aux produits agricoles italiens, au dire de la i Riforma. L’avis du journal ministériel est...

À propos

Face à une gauche qui ne parvient pas à contenir ses partisans, Léon Gambetta entend rassembler une majorité de républicains autour d’un nouveau quotidien, organe de l’Union Républicaine : La République française. Grand journal à 15 centimes, il consacre une part importante de son contenu aux nouvelles de province et joue un rôle considérable dans la victoire des républicains contre les conservateurs. La mort de Gambetta provoque de facto un infléchissement de la publication qui s’éteint lentement jusqu’en 1931.

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