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La République française, 5 février 1901

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La République française
5 février 1901


Extrait du journal

— Patron, deux litres ! Le patron sert ; les jeunes gens boivent, puis ils sortent sans payer. — Nous n'avons pas d’argent, vous savez, c’est la grève 1 Telle est la scène à laquelle a assisté notre correspondant à Montceau-Ies-Mines. — Qu’allez-vous faire ? demande celui-ci au marchand de vin. — Rien. Ils viendraient tout briser ici, si je me plaignais ; j’aime mieux perdre les deux litres. Tous les commerçants de Montccau restent ainsi terrorisés, sans protection. On sc croi rait dans quelque pays sauvage où la force est la raison suprême. Autre scène : cent grévistes, armés de fu sils de chasse, pénètrent dans le parc d’un châtelain, à quelques lieues de la mine. Les gardes accourent. — Halte-là! Vous ôtes sur une propriété privée. — Il n’y a pas de propriété privée. La chasse est à nous. Et, devant les gardes impuissants, ils abat tent par centaines les faisans et les lièvres. — Demain, disent-ils, nous irons chasser chez le comte, en face. Et ils firent comme ils avaient dit. Les au torités, prévenues, laissèrent s’accomplir ce forfait nouveau. Elles disposaient cependant d’une brigade entière de gendarmerie et d’un régiment de ligne. Mais il importe moins de faire respecter la propriété dans ce pays livré à l’anarchie que de ne pas mécontenter les députés socialistes qui président à la grève. Ceux-ci sont les maîtres du pays, mainte nant. D’un bout à l’autre de la France, ils prêchent la résistance aux lois, ils encouragent les attentats à la liberté du travail et les at tentats à la propriété, en face des gendarmes et des soldats désarmés. A ces derniers, ils conseillent la désobéissance et la désertion. Cette question de l’intervention des troupes dans les grèves a pris, dans ces derniers jours, une acuité particulière. On somme lo gouvernement de s'expliquer là-dessus. Et,en attendant qu'il ait cédé sur ce point, comme sur tous les autres, devant les prétentions des socialistes, ceux-ci poursuivent ouvertement leur campagne parmi les conscrits. M. Allard écrit aujourd’hui dans la Lanterne : a Tout » ceci nous indique de quel côté le socialisme » doit surtout diriger sa propagande. Quand » nous aurons fait comprendre aux jeunes » citoyens que le devoir militaire imposé par » la loi n’implique pas pour eux l’obligation » de voir des ennemis dans les grévistes » contre lesquels on les envoie, les fusils ne » s’abaisseront plus pour viser des citoyens » coupables de chercher à améliorer leur sort, » et le capital n’aura plus pour menacer les » travailleurs en grève que l’épée des officiers, » ce qui n’effrayera personne. » Ce jour-là, par contre, les grévistes auront le droit de piller les magasins, d'assommer les camarades et d’abaisser à leur tour les fusils de chasse, non plus sur les faisans du châtelain, mais sur le châtelain lui-même. On rencontre un peu partout, même à la Chambre, de braves gens qui lèvent les bras au ciel en criant : — Où allons-nous, mon Dieu ! où allonsnous ? Mais, mes bons agneaux, nous n’allons pas. Nous sommes arrivés. Et l’heure est ve nue de dire : — Où sommes-nous, mon Dieu I où sommes-nous ? Demain est effrayant. Maïs aujourd’hui n’est déjà plus tolérable. La révolution n’est pas à nos portes, comme on dit. Elle est entrée ; elle a pris pied sur i plusieurs points du territoire où les lois de la République n’ont plüs d’effet. L’autre jour, dans un groupe, au PalaisBourbon, un aéputé do la Loire racontait les...

À propos

Face à une gauche qui ne parvient pas à contenir ses partisans, Léon Gambetta entend rassembler une majorité de républicains autour d’un nouveau quotidien, organe de l’Union Républicaine : La République française. Grand journal à 15 centimes, il consacre une part importante de son contenu aux nouvelles de province et joue un rôle considérable dans la victoire des républicains contre les conservateurs. La mort de Gambetta provoque de facto un infléchissement de la publication qui s’éteint lentement jusqu’en 1931.

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