Extrait du journal

mon humble avis, écrire un beau vers qu’un vers bien pensé. Et le beau vers, pour moi, est celui où la forme est impeccable, l’épithète rare et la rime éblouissante. Seule, une exquise poésie éveille la subtile sensation de l’au-delà. Eu un mot, pour être un bon poète, il faut être surtout un ex cellent artiste. Et quel artiste délicieux que M. Armand Silvestre ! Quelquesuns affectent de ne voir en lui qu’un adroit jongleur de mots, qu’un habile assembleur de rimes. Dans ses vers, il est vrai, la pensée est souvent obs cure : mais comme l’expression est riche, comme ses rimes ont une fré missante vibration ! Voici une pièce des /t’oses d'octobre ; L’EXILÉ Je demande à l’oiseau qui passe Sous les arbre», sans s’y poser. Qu’il t’apporte, à travers l’espace, La caresse de mon baiser. Je demande à la brise pleine De là me mourante des Heurs De prendre un peu de t»n haleine Pour en venir sécher mes pleurs. Je demande au soleil de flamme, Qui boit la sève et fait les vins, Qu’il aspire toute mon âme Et la verse à tes pieds divins! Lisez ces vers à haute voix ; vous serez frappés de leur sonorité musi cale. Ce douzain est parfait comme exécution ; il est élégant et charmeur. Chaque mot est à sa place, chaque rime est choisie. On peut écrire des vers d’une forme aussi exquise, on n’en écrira pas de plus parfaits. Et maintenant,analysez chacun des qua trains. La pensée générale du poète est très nette; chacune des pensées particulières est indécise. C’est là le grand défaut de M. Armand Silvestre. Par une contradiction bizarre.il a tou jours de la clarté, mais il n’a jamais...