Extrait du journal

Une des questions qui préoccupent le plus vivement l’opinion est la question de l’armée. De récents événements ont inquiété les esprits, voire des plus optimistes, et il est désormais de toute évidence que, même à l’intérieur, même si nous ne faisons pas la guerre au dehors, nous avons besoin d’une armée ferme et obéissante. Comment le gouvernement a-t-il arrêté les mouvements populaires du Nord? En opposant la masse à la masse, en opposant aux grévistes, avec, un minimum de violence, des troupes solides et bien dressées. Par contre, une armée indisciplinée peut transformer la moindre émeute en un conflit sanglant, et mieux vaudrait n’avoir pas d’armée du tout. Que les mutins d’Agde se soient mis à faire feu sur leurs camarades — et l’on sait qu’ils ont tiraillé au hasard et en l’air dans Agde et sur la route de Béziers — quelles auraient été les conséquences de cette fusillade en un pays surexcité et dans le voisinage de régiments qui, nous dit-on, étaient assez mal en main ! Quel soudain et sauvage contact entre les révoltés et les soldats restés fidèles au drapeau ! N’aurait-on pas revu^ scènes de la fameuse insurrection de Nancy en 1790. Voilà les réflexions du public. Il n’assiste pas sans alarmes au progrès de l’antimilitarisme. Il songe qu’en cas de guerre certains de nos bataillons devraient peut-être, pour aller à la frontière, passer surie corps de leurs concitoyens. Certes, les institutions, les systèmes évoluent fatalement; mais, malgré...