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L’Avenir de la Mayenne, 12 octobre 1902

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L’Avenir de la Mayenne
12 octobre 1902


Extrait du journal

Les caisses d’épargne sont comme le « compte de dépôt » des petites bour ses. Pour ne pas le laisser improductif, on place à la caisse d’épargne l’argent qui n’est pas indispensable aux néces sités de la vie courante. On l’en retire en partie eu en totalité, suivant que se présentent des obligations imprévues ou supplémentaires, des entreprises qui exigent une mise de fonds immédiate, des déboires auxquels il faut faire face inopinément. Suivant les époques, l’ac tivité ou la stagnation des affaires, l’a bondance des recettes ou l’insuffisance des salaires, les placements l’emportent sur les remboursements, ou le con traire se produit. Cette année, et comme il arrive fréquemment dans la période d’été, les remboursements ont été supérieurs aux versements. Les ennemis de la République, res suscitant une tactique qui n’est pas nouvelle, se sont empressés de sonner le clairon d’alarme en liant à la ques tion politique le retrait des fonds des caisses d’épargne. Ils ont imprimé et eolporté sous toutes les fermes que la différence qui existe entre le total des versements et celui des rembourse ments, au profit de ces derniers, est de la part du travailleur français un acto de défiance vis-à-vis du gouvernement de la République, et une réponse signi ficative à la politique contre laquelle ils s.’élèvent. Comme ils trouvaient que la manifestation signalée n’avait pas assez de force pour produire les effets qu’ils en attendent, ils ont travaillé à en ac centuer le caractère. Ils ont invoqué lés moins-valuQs d’impôts, le déficit budgétaire, les difficultés financières avec lesquelles nous nous trouvons passagèrement aux prises : ils ont or ganisé une véritable campagne pour démontrer aux prévoyants français que leurs économies pourraient bien être compromises s’ils continuaient à les confier aux caisses d’épargne ; ils ont essayé de créer une panique de laquelle ils puissent tirer argument contre le gouvernement. C’est leur revanche du lamentable échec de leurs tentatives pour entraver le paiement de l’impôt. La manœuvre ne date pas d’hier, elle a été employée, sans succès mais avec insistance, contre le gouverne ment de Jules Ferry, au lendemain do l’application des décrets de 1880. Elle s’est renouvelée toutes les fois que les cléricaux ont cru devoir se venger du gouvernement en mettant l’Etat dans l’embarras. La tactique devint telle ment scandaleuse que le législateur dut intervenir. Une loi du 3 février 1893 édicta notamment les dispositions suivantes : « Sera puni des peines pré vues par l’article 420 du code pénal quiconque, par des faits faux ou calom nieux semés à dessein dans le public, ou par des voies et moyens frauduleux quelconques, aura provoqué ou tenté de provoquer des retraits de fonds des caisses publiques ou des établisse ments obligés par la loi à effectuer leurs versements dans les caisses pu bliques. » Le gouvernement n’est donc pas dé sarmé en présence des manœuvres du fjenre de celles que nous signalons. Il ui suffit de déférer au tribunal correc tionnel tout article ayant pour but do troubler le crédit public par le retrait en masse des fonds des caisses d’épar gne, car il n’y a pas là un délit de presse, mais un délit de droit commun qui tombe sous l’application du code pénal. La répression — et une répression sévère — peut donc enrayer le mal en contenant les efforts des alarmistes, mais cela ne suffit pas. Il faut éclairer la clientèle des caisses d’épargne, en la mettant en garde contre les entraîne ments d’une crédulité irraisonnée. Les déposants des caisses d’épargne jouissent en France de garanties qui les mettent à l’abri de toutes les fluc tuations des finances publiques. Les sommes qu’ils versent sont recueillies, centralisées, placées par les soins de la caisse des dépôts et consignations en valeurs de premier ordre, productives d’intérêts qui ne se confondent, à aucun moment, avec les recettes de l’Etat. Ils constituent un budget à part, et ces re venus, totalement distincts des revenus de l’Etat, alimentent les intérêts servis aux déposants. Les intérêt* du portefeuille de la Caisse des dépôts et consignations forment à présent, dit le Temps, un budget si élevé et si sur qu’ils dépassent, à eux seuls, largement, les sommes qui, en temps normal, sont retirées par les déposants. Même dans les périodes de retraits de fonds, il se trouve que, sauf exceptions, l’ensemble des capitaux dus pour les Caisses d’épargne ne cesse pas de pro gresser. Des retraits anormaux changeraient eertes cette situation ; mais si l’on pense que la Caisse des dépôts aurait peine à y faire face, on se trompe encore, tant le porte feuille qu’elle s’est composé a de puissance de mobilisation. Il est vrai que, si la Caisse des dépôts devait en venir à cette extrémité de réaliser une partie de son portefeuille, les ventes auxquelles elle serait condamnée pè seraient plus ou moins lourdement sur le marché, et telle est bien l’éventualité qui s’escompte ; mais, même alors, la situation des déposants des Caisses d’épargne demeu rerait intacte : voilà ce qu’on oublie. Le por tefeuille par lequel sont représentées les épargnes des déposants a une valeur qui dé passe tellement le montant de ces dernières, que, dans l’hypothèse la plus défavorable, la réserve latente de la Caisse des dépôts ne saurait être épuisée. Pour n’en citer qu’un exemple, sur les seules rentes 3 0/0 amortis sables de ce portefeuille, qui figurent dans les bilans pour 1 milliard 450 millions, la valeur de réalisation, aux cours du jour, fe rait ressortir un bénéfice de 300 millions. Très prudemment, la Caisse des dépôts n’a jamais compté ses titres que pour leur valeur...

À propos

Fondé en 1878, L’Avenir de la Mayenne est un quotidien régional publié à Laval, puis à Rennes. Il change de nom en 1932 pour devenir Le Républicain de la Mayenne avant de disparaître en 1942.

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