Extrait du journal

Ceci est de l’histoire, de l’histoire littéraire et con temporaine. Je veux que mon amie Clio en grave les détails sur les tables d’airain delà postérité. Depuis que M. Eugène Sue a recommencé l’Odys sée du Juif errant, sa vie est un long martyr, son sommeil un éternel cauchemar. Quand il veille il tremble pour ses jours, quand il dort il rêve qu’on le fait rôtir comme saint Laurent sur un gril. Dans ces brûlantes circonstances, les païens sont des jésuites. Ces jésuites sont bien peu gentils. L’ombre de saint Ignace de Loyola a suscité con tre lui deux mille Rodins français, tous plus ou moins Lucernois de cœur. Ces Rodins tendent une foule de pièges sous ses pas. M. Eugène Sue ne sait plus à quels serviteurs se vouer. L’autre jour encore il s’est aperçu que son portier était un Suisse, et un Suisse de Fribourg encore. Quand il se met à sa fenêtre, il voit à tous les coins de la rue de la Pépinière des jésuites déguisés en commissionnaires, qui le surveillent en buvant du vin baptisé chez de faux marchands. Etant allé dimanche dernier à Versailles visiter un janséniste de ses amis, il fut surpris par la faim près du bassin d’Apollon. Un marchand de gauffres passait par là. M. Eugène Sue l’appelle, et voilà que l’industriel s’approche en saupoudrant les tartelettes d une poudre blanche enfouie dans un cornet. La main du romancier qui déjà plongeait dans la man ne s’arrête ; cette poudre blanche pourrait bien eue...