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Le Constitutionnel, 29 octobre 1831

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Le Constitutionnel
29 octobre 1831


Extrait du journal

mystérieuse qui s'appuie sur une vocation et une origine divine ; mais l'arrangement territorial'établi- dans l'intérêt de l'équilibre des états. La convention, qui, collectivement, avait le génie d'un grand homme, et Bonaparte, se sont successivement placés en dehors de l'ordre européen ; ils ont voulu fonder un nouveau droit public, et ont. dit tour-à-tour : l'Europe c'est moi. La convention agrandit la France parles insurrections, Bonaparte par les armes, et le statu quo territorial d'alors fut détruit. La convention et Bonaparte attirèrent sur la France la réaction "du monde. La révolution de juillet a pro fité des enseignemens de l'histoire ; bornant ses effets à une existence intérieure, monarchique au-dedans ; pacifique au-dehors, elle a res pecté le statu qrtto tevritorial. Et remarquez-le bien, Messieurs, si la révolution de juillet avait pris un autre caractère, c'en était fait de l'indépendance de la Belgi que. La nationalité belge n'est pas une de ces idées larges qui reutrentdans ces vastes projets de commotions universelles ; c'estuneidée étroite, factice peut-être, qui se rattache au vieux système de l'équi libre européen ; c'est une idée de juste milieu. Aussi pour moi je n'ai jamais pu comprendre ceux de mes concitoyens qui, partisans de l'indépendance belge, reprochent à la France son rôle pacifique. Quand la France sortira au lit que lui ont creusé les traités de i8i5, ce sera pour submerger la Belgique. Ce que la France de juillet 11'a pas osé, la Belgique pouvait-elle le tenter? Le fait de septembre n'est dans son origine qu'une insurrection contre la Hollande, il pouvait dans ses suites devenir une insurrec tion contre l'Europe. Mais , demandera-t-on , fallait-il donc que la Belgique se reconsti tuât dans le sens des traités de 181.5? Ne confondons pas le système de l'équilibre avec le système du droit divin, pour faire rejaillir sur le premier l'odieux et le ridicule du deuxième. ' C'est le but dès traités de 1815 qu'il faut rechercher; les moyens peuvent subir des transformations, pourvu que le but subsiste et soit atteint. ' La création du royaume des Pays-Bas n'était pas le but, mais seu lement le moyen. La révolution belge, en rompant l'union de la Bel gique et de la Hollande, a porté atteinte aux traités, relativement au moyens ; mais, en proclamant l'indépendance, elle a maintenu les traités, quant au but. Par la destruction dés moyens, les traités ont été violés dans ce qu'ils ont de transitoire et de variable. Par la destruction du but, ils auraient été violés dans ce qu'ils ont de constitutif et d'incommutable. La Belgique ne s'est pas rendue coupable, de cette dernière viola tion. . Parla première, elle s'est mise en hostilité avec la Hollande; par la deuxième, elle se serait mise en hostilité avec l'Europe. La Belgique, en décrétant son indépendance, a donc coordonné sa révolution, au système général ; en acceptant la suspension d'armes, elle est entrée dans la voie diplomatique. ' Le jour où le gouvernement provisoire» signe la première suspension d'armes ( c'était le ai novembre i83o), la question .de paix ou de guerre a été décidée saris avoir été plagiée peut-être ; depuis lors elle a disparu de l'ordre du jour. C'est le ai novembre qu'a été prise une résolution qui a dominé notre révolution tout entière. C'est ce que n'ont pas compris ceux qui depuis ont voulu alternativement la paix ou la guerre, les négociations ou les hostilités. Depuis le ai novembre il y avait chose jugée. Pour ne pas faire dé générer l'insurrection contre la Hollande en une insurrection contre l'Europe , il fallait mettre fin au système belliqueux et entrer dans le système diplomatique; mais, le choix fait,il était impossible de revenir sursespas. Une fois seulement votre position a changé, et, j'ose le dire, jamais elle n'a été plus belle. Nous avions invoqué, le droit de la conquête. Le roi de Hol'lande, parla reprise des hostilités, est venu nous l'offrir; nous n'avons pas su le saisir. La guerre aggressive nous était interdite, la guerre défensive nous était offerte avec tous ses avantages. Dans le système belliqueux nos moyens eussent été les armes; dans le système diplomatique nos moyens devaient être les anciens traités. Dans celte voie nous devions succomber partout où les anciens trai tés étaient contre nous. La diplomatie ne défait pas les traités ; elle les applique; la guerre seule les défait,et, sous peine denousplacer eu hostilité avec tout le monde, la guerre nous était défendue. C'est ce que le congrès a compris en adoptant les préliminaires de paix qui consacrent en faveur de la Hollande l'application des anciens traités. Si le gouvernement en juin dernier avait été autorisé à abandonner Yenlooet Maastricht, la Belgique serait constituée depuis long-temps et d'une manière bien plus avantageuse. La Hollande n'eût eu que l'extrémité septentrionale du Limbourg et une langue entre Veuloo et Maëstricht, au lieu de la rive droite toute entière. Le grand-duché nous eût appartenu en entier, moins la ville qui, avec sa banlieue, eût été déclarée ville libre de l'empire germanique. Nous étions alors à l'apogée de notre puissance révolutionnaire : de cette époque date la marche descen3aute. Alors l'immortelle Pologne, qui tôt ou tard de vait succomber sous le nombre, luttait encore. La royauté de LouisPhilippe n'avait pas encore perdu l'appui de l'hérédité de la pairie ; une chambre auti-réfonniste commençait ses séances à Westminster, et l'aristocratie anglaise était silencieuse, La Belgique apparaissait au monde entourée de l'auréole des victoires de septembre. Le grand fait social sorti des journées de juillet était debout, resplendissant de gloire et dans toute la vigueur de la jeunesse. Depuis, il a été vaincu; il l'a été eu Belgique, en Pologne, en Angleterre : c'est sous l'influence de cette défaite que nous avons négocié. La question belge était complexe , commerciale et militaire : la question militaire a été résolue contre nous parce que l'intérêt euro péen a paru l'exiger. La question commerciale a été résolue en notre faveur, parce que l'intérêt européen a paru l'exiger. La question militaire était celle-ci : Faut-il prolonger le territoire hollandais jusqu'à Maëstricht, le long de la Meuse, de manière à ce que la Hollande forme une deuxième barrière contre la France? Faut-il joindre à la ville de Luxembourg un territoire assez étendu pour que, sans trop de ridicule , le roi de Hollande puisse encore s'intituler grand-duc de Luxembourg, et rester membre de la confé dération germanique ? Ces deux points fondamentaux ont été décidés contre nous, et cette décision est,hors de la portée de nos délibérations parlementaires. Dans cette décision on n'a consulté ni les intérêts de la Belgique , ni même ceux de la Hollande. Les exigences commerciales de la Hollande étaient incompatibles avec le système commercial de l'Europe,, elle aurait voulu faire re vivre le monopole qu'elle exerçait autrefois, au moyen de la ferme ture des rivières et des fleuves, non-seulement aux dépens de la Bel gique, mais aux dépens du monde. Ses prétentions ont été condam nées; elle demandait le Limbourg comme position commerciale , elle l'obtient comme position militaire. Les cinq puissances saisissent cette occasion de défendre la libre navigation du Rhin , mal définie ,...

À propos

Le Constitutionnel fut un quotidien politique sur quatre pages, fondé par Fouché et une quinzaine d’actionnaires, pour la plupart contributeurs du journal. D’abord bonapartiste, il s’agissait d’un organe puissant jusqu’à la naissance du Second Empire, rassemblant bonapartistes, libéraux et anticléricaux. Marqué par la personnalité d’Adolphe Thiers, le journal rendait compte des informations diplomatiques européennes, mais discutait également de l’actualité politique française.

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