Extrait du journal

Quand vous voyez un corbeau prendre sa volée sur la montagne, vous pouvez alïirmer, sans craindre de vous tromper, qu’il y a là quelque débris de charogne. Le National est le corbeau du radicalisme; il a toujours le nez au vent pour flairer l’émeute; il prête l’oreille aux échos les plus lointains pour savoir si ces échos lui rapportent le bruit d’une révolution nouvelle. Il est de tous les pays en cette manière. Que la révolution lui vienne de Madrid, de Naples, de Zurich, de Modène, de Varsovie, de Bruxelles, de Birmingham, peu lui importe, elle est toujours la bien-venue. Le National lui otera son chapeau et lui fera avoir un toast au premier banquet réformiste, à 2 fr., vin compris. Avec sa lou^e, le National vient de découvrir un semblant de troubles en Danemarck. On a parlé d’émeute à Copenhague; dans ces paisibles contrées du nord, où le pouvoir montre si rare ment des obstacles, le roi a été outragé par le peuple; une sorte d’ovation a été décernée à un avocat qui s’est posé comme chef d’opposition et comme champion de la liberté de la presse. Préoccupés de rfos propres affaires, nous n’au rions peut-être jamais pensé à Copenhague; mais le National n’est pas fait à notre image; il ne dé daigne pas ce parfum d’émeute qui vient de si loin chatouiller le tympan de son organe radical. Les évènements se suivent avec une telle rapi dité que le temps manque, non seulement pour les apprécier et les juger , mais même pour en parler. Aujourd’hui, c’est la nouvelle d’un grand crime', demain, ce sera celle de quelque grand événement politique ou littéraire. Les Juifs de Damas, l’affaire du Glandier, le blocus de Naples, les actes du ministère, ceux de MM. Balzac et G. Sand , les cendres de l’Empereur , les bulletins d’\lger, Elicabide, voilà pour le moment les gâ teaux dont se nourrit ce cerbère à mille têtes qu’on nomme le public. Il y a , comme on voit pour tous les goûts, le ridicule vous repose du...