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Le Figaro, 4 avril 1928

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Le Figaro
4 avril 1928


Extrait du journal

PROMESSES Les panneaux sont déjà dehors. Ils ne mon trent pas encore leur plein d'affiches. Mais nous n'attendrons pas longtemps ces papiers rouges, jaunes ou verts, sur lesquels, à côté de récriminations bien senties, fleurissent les promesses. Cette année, parait-il, au moins dans la ré gion parisienne, nous aurons le spectacle gra tuit d'un grand nombre d'affiches illustrées. La lutte par l'image ! Joli divertissement... Après tout, une caricature, si méchante soitelle, a moins de bassesse qu'une injure. Mais c'est sans doute dans l'allégorie que s'exercera la verve des dessinateurs. Les candidats ont fait une telle dépense de mots et de gros mots qu'ils craignent sans doute que l'électeur fatigué n'attache plus à leurs promesses écrites unè importance suffisante. Mais un pauvre vieillard succombant sous le poids des impôts comme le bûcheron de la fable qui appelait la mort, « Ton Tanatôn epekaleito », voilà qui parle à l'imagination ! En regard, un prolétaire bien vêtu quittant son usine dans une petite auto mobile et arrivant devant sa jolie maison sur le perron de laquelle l'attend sa famille joyeuse. Une telle image possède une force d'expression qui peut décider un hésitant. Il nous sera certainement plus agréable de suivre les campagnes électorales au gré des ingénieuses trouvailles des artistes que de lire les pesants manifestes des politiciens qui nous demandent nos voix. Beaucoup d'entre eux ont pourtant des pro grammes dont la fantaisie n'est pas exclue. Assez nombreux sont les candidats qui récla ment par exemple la suppression de tous les fonctionnaires. Mais une mention spéciale est méritée par un horticulteur d'un département du Centre qui se présente aux suffrages de ses concitoyens pour réclamer la suppression du divorce. Nous ne voulons pas supposer que cet horticulteur a des raisons personnelles de désirer que son épouse soit liée à lui à jamais. C'est au bonheur de l'humanité que songe cet ami des fleurs. Peut-être se préoccupe-t-il aussi de renouveler les inventions des auteurs dra matiques. i Ceux-ci ont fait du divorce un usage immo déré. Ils doivent éprouver le besoin de revenir aux situations fortes que les unions indisso lubles engendraient. Si en même temps d'autres candidats s'ingé niaient à restaurer l'autorité paternelle, à res susciter le sentiment de l'honneur et autres ba livernes dont personne ne se soucie plus, que de bonnes vieilles pièces pourraient sortir de l'armoire, habillées à la mode nouvelle ! Pierre Soulaine....

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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