Extrait du journal

J'apprends seulement aujourd'hui la mort d'un de nos confrères, Paul Laurent, chevalier de la Légion d'honneur, lieute nant aux chasseurs d'Afrique, qui fit la campagne du Mexique et à son retour, il y a un an à peu près, fut nommé capitaine dans.mv régiment de hussards. Paul Laurent a collaboré à plusieurs journaux, et surtout au Figaro et à l'Evé nement; il y a publié notamment des récits du Mexique qui ont eu un grand succès. Paul Laurent a prouvé à plusieurs re prises son habileté à l'escrime difficile de cette arme délicate : la plume. Il avait de l'esprit, et du meilleur, et du style et dujugement. Il savait penser et écrire. Il a publié, il y a quelques mois à peine, un livre très curieux et très intéressant qui demeurera au nombre des meilleurs récifs qu'on ait faits sur la campagne du Mexique. — Trois ans au Mexique, un bon livre plein de faits curieux et d'épisodes intéressants recueillis par l'auteur sur les lieux mêmes. Au moment où son livre parut, Paul Laurent s'alita; il souffrait depuis long temps, le travail de son livre l'avait sou tenu en l'épuisant; quand il put respirer et se reposer, il était mourant. Il partit pour les eaux, mais il était trop tard. Il est mort il y a un mois. - Pauvre, brave- et digne garçon! Un mois!.,, et on n'en a rien su. Il est allé, mourir, seul, isolé, loin de ses amis, et c'est trente jours plus tard que cette nou velle nous arrive. Je le vois encore, petit, sec, nerveux, un peu roide, le nez en bec d'aigle, le re-~ gard perçant et droit, plein de vigueur et d'énergie exubérante. On le croyait tou jours à la tête de son escadron. Et c'est fini! il est mort! Pauvre ami Laurent!...