Extrait du journal

Que de morts à relever en une seule semaine ! Quel si nistre commencement d'année ! En huit jours, et pour ses premiers coups de faux, l'année nouvelle étête l'art, la noblesse, la guerre : elle a frappé Rachel comme le feldmaréchal Radetzki^et le fils du vainqueur de Toulouse, le dernier duc de Dalmatie, en même temps que' ce fidèle serviteur du drapeau blanc, le général marquis d'Epinay Saint-Luc. Eh bien ! n'en déplaise à ces grands noms, les plus splendides funérailles, le deuil le plus populaire auront été pour la tragédienne. Pardonnez-lui cette irrévérence de sa gloire : c'est la dernière fois qu'elle fait du bruit dans le monde. L'immortalité du comédien, eût-il élé le dieu même de son art stérile, tient si peu de place dans l'histoire, qu'on ne doit pas en vouloir à sa mort de faire explosion dans la chronique. L'admiration du public pour un grand acteur tire sur sa tombe un feu d'artifice dont rien n'égale l'éclat et le fracas ; et puis, le lendemain de tout ce bruit, plus rien : un peu de fumée à peine atteste qu'il y a là une gloire qui ne s'explique pas à la postérité par des œuvres. Aujourd'hui, la vraie chronique de la semaine, celui qui vous a parlé de mademoiselle Rachel l'a écrite. C'est aux (1) Toute reproduction est formellement interdite....