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Le Figaro, 10 juillet 1883

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Le Figaro
10 juillet 1883


Extrait du journal

Je l'appelle About, tout court, comme il.aime à être appelé, et comme il marque. Autrefois il s'adjoignait Edmond, et c'est avec Edmond qu'il a fait le tour du monde ; mais aujourd'hui il a com plètement renoncé à ce pauvre Edmond. Au bas de ses articles on lit : ABOUT, sans la moindre initiale. Il a.emprunté cela à un homme qui signait simple ment : Guizot 1 Je ne fais d'ailleurs aucune difficulté d'avouer que je n'ai jamais eu de rap ports directs avec M. Edmond About. Il y a des gens très répandus qui connais sent tout le monde in naluralibus. Par lez-leur d'un monsieur quelconque, ils ont toujours eu la chance de vivre dans sa familiarité et de recevoir ses confi dences les plus intimes. Poussez-les un peu, ils vous diront qu'ils l'ont vu plu sieurs fois changer de chemise, et si la flanelle qu'il porte est ourlée de rouge ou de blanc. Je n'ai recontré M. About que dans la rue ; je n'ai causé avec lui qu'une seule fois, et il n'en sait rien ! C'était à Bue, entre Jouy et Versailles^ pendant la Commune. Il déjeunait sous la tonnelle d'un cabaret ; j'y pris place à mon tour, heureux de mon obscurité qui me permettait de contempler à loisir un homme- célèbre. Quand m'arriva le fro mage, déjà expérimenté par lui depuis quelques minutes, remarquant une cer taine grimace que je faisais : — « Oui, dit-il, il y a beaucoup de plâtriers dans le pays 1 » Cinq ou six ans auparavant, à la suite d'un juste hommage que j'avais rendu à son talent dans le Courrier du dimanche ou le Journal de Paris (je ne me rappelle plus exactement), il avait adressé à mon pseudonyme un petit billet charmant de finesse et, Dieu me pardonne, de modes tie. Appréciant lui-même, avec beau coup de sens, l'espèce de temps d'arrêt qui s'éiait produit tout à coup dans sa crue littéraire, et craignant sans doute d'avoir déjà dit son dernier mot : « C'est notre destinée à tous, m'écrivait-il, nous parlons le matin pour conquérir le monde, nous nous lançons, les yeux fer més, sur toutes les mers, et puis, quel ques années après, nous sommes tout heureux de conduire à la rame de petits bateaux, qui vont sur l'eau 1 » Voilà, hélasl toutes mes relations avec l'écrivain d'élite qui, dans trois mois, sera probablement l'un des quarante de l'Académie française. Et cependant je crois bien le connaître I...

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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