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Le Figaro, 11 octobre 1897

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Le Figaro
11 octobre 1897


Extrait du journal

Dans toute cette littérature pleurarde, revendicatrice, dans cette littérature de tribunal civil, nous ne voyons défiler que des révoltées, pas une seule rési gnée. Aussi la plupart de ces Vassales ne sont que médiocrement intéressantes. Mais personne ne parle de la vraie vas sale, celle qui existe encore, celle qui n'est pas à la mode, et à qui devraient aller toutes nos tendresses, tous nos sou cis : la femme qui s'use de travail et de veillées pour un maigre salaire; l'in nombrable passive et résignée qui élève tant bien que mal, et à tout prendre, qu'elle en soit bénie! plutôt bien que mal, des ribambelles d'enfants, bouches dévorantes, être aimés et pas toujours reconnaissants. Oh ! que dès qu'on sort de cette atmos phère factice du théâtre et du roman,.les Vassales mondaines, les Vassales pour rire, apparaissent fausses et grimaçantes, et combien les problèmes du cœur et des sens deviennent pâles au prix du pro blème du pain ! : Que les élégantes querelles, en termes choisis et scandés, sont indifférentes à la marche de la race I Quand on voit la vraie vassale française, belle pourtant, et simple, et de bonne humeur, on n'a même pas envie de donner un sou à la Vassale de Comédie-Française. Mais ce qu'il y a de comique par-des sus tout, c'est que justement toutes ces jérémiades se passent dans un monde où la Vassale est toute-puissante etmène les suzerains les plus forts par le bout du nez. Il n'y a pas de '■ Vassales. Il y a le Vassal, le Vassal qui s'ignore, le Vassal sans le savoir. Celui-là pullule dans no tre monde sous un faux nez de tyran, sous une perruque d'oppresseur. C'est l'homme moderne, exclusivement hanté de la femme, ne vivant que pour elle, n'agissant que par elle. Il file doux devant la Vassale ; il la regarde du coin de l'œil pour savoir, avant de parler, s'il a la permission d'ouvrir la bouche, et, après avoir parlé, pour s'assurer (en tremblant) qu'il n'a pas dit une sottise. Comme un collégien devant le pion, il lève deux doigts pour demander la moin dre permission de sortir. Ah ! la canaille de tyran, le scélérat de Suzerain, le pau vre diable d'oppresseur, comme la Vas sale l'a bien dressé ! Et il est convaincu que la Vassale doit être émancipée. Il se reproche de ne pouvoir lui accorder plus de liberté et plus d'influence. Il a des remords. Il cherche encore sur lui s'il n'a pas encore un peu de docilité et de dignité à jeter sous les pieds de son esclave. La Vassale, l'irritante, la tyranniqueet la malfaisante Vassale en somme, guide et dirige tout à présent. On la rencontre dans tous les dessous de la politique, de l'art, de la société ; rien ne s'accomplit sans qu'on la consulte. Elle fait et défait les gouvernements, inspire les œuvres, accorde ou refuse les réputations,brouille les cartes, paralyse parfois de nobles efforts d'hommes, et quand on lui a bien accordé tout ce qu'elle demande, et le reste, elle menace de retourner chez sa mère. Arsène Alexandre....

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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