Extrait du journal

Le matin, c'est une façon d'écrire. C'est ainsi que commence la journée, mais est-ce bien le matin ? Il est rare de s'éveiller avant midi. Cette matinée tardive qui rogne un bon morceau d'après-midi mérite pourtant qu'on s'occupe d'elle. Je ne sais même si elle ne • procure pas le meilleur moment de la vie de Biarritz. On s'éveille, il fait beau, on oublie qu'il est tombé la veille dans la rue des grêlons comme des œufs de cane et au baccara, seul rçfuge: possible, des bûches encore plus dange reuses. On passe un maillot sombre, un peignoir vif, et ■ une voiture vous amène à la Chambre d'Amour,"Jamais endroit ne mérita plus mal son nom. Rien n'est moins intime que cette immense plage ouverte au vent. Les gens qui se sont fait construire des maisons de l'autre côté de Biarritz, sur la Côte des Basques, en disent pis que pendre, furieux d'avoir vu la foule des snobs se déplacer vers le nord et les abandonner... A la Chambre d'Amour, il y a deux écoles. D'abord, celle de ceux qui aiment la mer, ce sont, les moins nombreux. Ils s'éloignent des parasols à gros pois — qui, vus de l'avion du service quotidien, semblent des troupeaux de bêtes à bon Dieu— ils entrent courageusement dans l'eau, luttent contre les vagues souvent violentes, vont nager au large en dépit de la corne d'aPPel des maîtres-baigneurs qui font la belotte sur,le sable et reviennent avec peine, le souffle court, les yeux brillants, gardant l'éclat du soleil qu'ils ont regardé face à face. Rien n'est plus amusant comme contraste que d'aller aussitôt s'asseoir à une table autour de la piscine. Ici, plus de vagues, plus de soli tude. Tout Biarritz, tout Paris, sont là. Beau...