Extrait du journal

AU JOUR LE JOUR peuplç de naît Après ces journées torrides, les nuits sont tentatrices et vous invitent à des promena des. A l'heure où. les tavernes se ferment, où les réverbères s'éteignent, où les Halles s'a niment et, comme dit Moréas, patron des noctambules, A l'heure où l'on entend, dans l'omhre taciturne, La charrette, du maraîcher, il est doux de quitter sa maison, d'errer par ce vieux Paris, de rêver sous les étoiles et de goûter/ avant le soleil, le tumulte et la poussière d'un nouveau jour, ce moment de fraîcheur et de liberté. Mais, où que vous mène votre fantaisie, n'espérez pas de trouver la solitude. Tout un peuple se répand par la ville et grouillé au tour de vous. Regardez ces ombres qui glis sent au long des murs, qui s'allongent sur les bancs, devant les portes, \;ur les trottoirs. Oh ! Madame, 11e prenez pas. peur. Ce ne sont ni des malandrins ni des spectres, mais de pauvres diables, faciles a effaroucher : ce sont les liôtes habituels des asiles de nuit. Si peu douillet qu'on soit; 011 ne saurait, par tous les temps, par le vent ou la neige, coucher sur la berge de la Seine ou dans les vallons des fortifs. C'est pourquoi, pendant la plus grande partie cle~ l'année, dans les refuges que leur. ..offre une .société .qu'ils mé prisent, ils vont mêler leur vermine et leurs odeurs. Mais ils-11e. s'y résignent qu'à re gret. S'ils ont choisi leur genre d'existence, leur vagabondage et leur fainéantise, s'ils ont renoncé à un lit et à un domicile, s'ils se nourrissent de croûtes et d'eau, s'ils se com plaisent. dans leurs loques et dans leur crasse, c'est qu'ils refusent de subir mille sujétions. . Et, ' que l'été s'épanouisse, ils n'ont plus besoin d'autre hospitalité que celle des nuits tièdes et bleues. Les drôles de citoyens !.Jê m'étais fait parmi eux, avant la guerre, au cours de flâ neries, quelques camarades pittoresques. Un d'eux, Jean-Baptiste, se flattait d'avoir été notaire et gardait, ma foi, dans ses haillons, une certaine respectabilité, professionnelle. Se déclarant enchanté de son sort, il ne par lait qu'avec dédain des malheureux, des es claves qui travaillent. Ce n'est pas' «,u'il observât une oisiveté absolue. Il ramassait les mégota et se rendait chaque dimanche à l'hospice de Sainte-Anne, pour vendre sa récolte, dont il tirait environ quarautp sols;...