Extrait du journal

Nous sommes en carême, en plein carême, la scène se passe devant la porte d'un restaurant célèbre. Il est minuit, le temps est sinistre et froid, une foule étrange ment bariolée se presse sur le trottoir, elle assiège la porte à peine entrebaillée ; un chaud rayon fait écla ter les vives étoffes et les élégants costumes dont les assaillants sont revêtus. ——— On parlemente à travers les volets, le flot monte toujours, de nombreux véhicules versent à chaque ins tant de nouveaux groupes qui se viennent joindre aux premiers. Aux fenêtres du premier étage, des silhouet tes, coiffées du tricorne municipal, se profilent en tons sombres sur les fonds lumineux des salles de danse. Une pluie fine commence à tomber. Les pierrettes grelottent, les postillons lèvent les bras au ciel, les chicards battent la semelle, les incroyables et les es claves grecques maudissent le jour qui les a vus naître ; et le flot monte toujours. Ils sont trente, ils sont cinquante, les voilà cent ! Et ce sont de nouvelles clameurs chaque fois qu'un coupé verse sur les marches du restaurant un brelan de mas ques comme une gondole qui aborde un palazzino par un soir de carnaval,...