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Le Fin de siècle, 2 mai 1895

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Le Fin de siècle
2 mai 1895


Extrait du journal

Et toutes elles tombèrent d’accord que l’unique moyen de mâter amants et maris était de leur imposer la volonté com mune, per la grève. Voici à peu près ce que dit Jeanne de la Hachette, qui mérita, ce jour-là, d’être appelée le d’Artagnan du groupe. — Mes chères bonnes, — et laissez-moi vous dire : citoyennes — vous savez comme moi que le nerf de la guerre, c’est l’argent; la galette, il n’y a que ça. C’est donc à la bourse qu'il faut frapper. Ce qui fait notre infériorité, c’est que l’argent est entre les mains des hommes ; nous n’avons que ce qu’il leur plaît de nous donner; quand ils ne veulent pas casquer, faut que nous canions. Mais supposons que nous soyons aussi riches qu’eiix : alors, vraiment, nous sommes leurs égales, nous marchons quand ça nous plaît; quand ça ne nous plaît pas, nous ne mar chons pas. Ce qu’il nous faut obtenir, c’est le partage de la fortune publique en parts égales, entre les hommes et les femmes. Nous sommes raisonnables, après tout : la moitié du pognon pour les hommes, et la moitié pour nous, sacré mâtin ! Je pro pose donc : « Article unique : L’argent sera partagé également entre les « deux sexes. » — Bravo ! bravo ! cria la basse de Miss Athos. — Les moyens? reprit en s’animant un peu l’orateur. Nous sommes toutes d’accord : Nous refuser aux embrassements masculins jusqu’à ce que nous ayons obtenu satisfaction. Aie pas peur, c’est eux qui lâcheront. — Pour des motifs un peu différents, je suis entièrement de l’avis de l’honorable préopinante, fit la grande dame. — Bien parlé ! approuva Miss Athos. Je dis comme toi, ma fille : pas de galette, pas de femmes 1 Et de sa chère voix d’or, Miss Aramis susurra : — Si les gentlemen refusent le bill, Adieu les doux baisers et les nuits amoureuses ! — Donc, conclut vigoureusement l’amphitryonne, je'repro pose : « Second article : Jusqu’au jour où l’article unique ci-dessus « aura reçu force de loi, la grève ! » — Est-ce torché, ça! La proposition fut votée par acclamations. Et chacune s’en gagea, — par serment, parait-il, — à consacrer tous ses efforts à la propagande de la grève....

À propos

Fondé fin 1890 par François Mainguy et René Émery, Le Fin de siècle était un journal mondain bihebdomadaire. Lorsqu’il paraît, il sort immédiatement de la masse en vertu de son style badin et de l’érotisme à peine voilé de ses dessins. En 1893, son « bal Fin de siècle » fait scandale à cause de la tenue très légère de certaines de ses convives. Quelques années plus tard, en 1909, le journal devient Le Nouveau Siècle. Il disparaît en 1910.

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