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Le Fin de siècle, 24 octobre 1897

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Le Fin de siècle
24 octobre 1897


Extrait du journal

Elle eut peur de son mari, considéra les envies du mâle comme un supplice cflroyable, et chaque fois que le mari réclamait ses droits, elle cachait ses yeux dans la batiste, pour pleurer. Blanche aimait son mari comme beaucoup de femmes aiment leur mari ; sans doute, elle ne souffrit plus jamais ; mais, quand même, elle pensait tou jours à la nuit effroyable ; elle avait dans la mémoire, gravée, l’expression de son martyre, et ce souvenir terrible enlevait à sa nervosité toute sa sen sibilité. J’abrège. Son mariage fut terne ; elle eut le dégoût de la vie, se regarda comme volée par la nature qui ne lui avait pas donné les mêmes moyens qu'aux autres femmes d’oublier les petites misères normales, grâce à la possibilité de vo luptueuses tendresses ; elle devint triste, son caractère s’aigrit, elle éloigna le mari de son intimité, celui-ci prit une maîtresse, et alors commença le trantran stupide du mariage sans amour. Chez .une amie, Blanche, un jour, fait la connaissance d’un jeune homme qui lui fut présenté ainsi ; — Monsieur G..., le plus parfait ga lant homme et le plus pervers des hommes. Méfiez-vous-en, chère amie, on lui accorde des succès. On causa de choses d’amour. Blanche écoutait, parlant peu. Le jeune homme parla beaucoup, au contraire, eut de 1 éloquence comme un amoureux de la femme peut seul en montrer, fit preuve d’esprit, eut des mots charmants et des phrases si caressantes que Blanche en fut infiniment troublée. Vous avez deviné, n’est-ce pas ? Oui. Blanche aima le brillant polis son , le désira, retrouva ses envies de connaître ce qu’était le plaisir : elle fut sa maîtresse: Et elle ne se souvint plus avec lui des douleurs d’autrefois, elle n’y songea pas une minute, elle n’avait dans sa jolie tète qu’un désir : ce désir l’étrei gnait, l’énervait, la rendait amante, aimante, voluptueuse, perverse, gour mande. Les baisers qui chuchotèrent sur 1 humidité rose de ses lèvres euient tant de charmes, qu’au seul bruit de ces baisers, elle frémissait toute d’un long frisson de luxure. Elle allait vers l’immense plaisir, elle se sentait emportée vers l’idéal de joie, elle se croyait ivre ou folle ; elle souriait comme les anges savent sou rire, les yeux vers le ciel, les yeux pleins de prière, avec, sur les cils, une larme de bonheur. Tout son petit corps se remplissait d’extase, de vibrances; elle était trans portée vers le paradis, transformée, re nouvelée dans sa chair et dans son âme, et quand elle crut mourir de joie, de bonheur, elle n’avait que défailli sous trop de plaisir. L’amant, le péché commis l'avaient élevée vers la joie jusque-là inacces sible. Chère lectrice qui me demandez « pourquoi ? », vous si effroyablement lasse d’attendre, vous qui n’avez plus d’espoir, ne désespérez pas... mais n'at tendez plus. Sachez choisir qui vous aimera mieux que votre mari, et que Dieu vous donne toute la joie que je vous souhaite. Ainsi soit-il. Victorien du SAUSSAY....

À propos

Fondé fin 1890 par François Mainguy et René Émery, Le Fin de siècle était un journal mondain bihebdomadaire. Lorsqu’il paraît, il sort immédiatement de la masse en vertu de son style badin et de l’érotisme à peine voilé de ses dessins. En 1893, son « bal Fin de siècle » fait scandale à cause de la tenue très légère de certaines de ses convives. Quelques années plus tard, en 1909, le journal devient Le Nouveau Siècle. Il disparaît en 1910.

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