Extrait du journal

En mai 1871, pendant la « semaine sanglante B, le jour où les troupes de l'ordre ont reconquis le Père-Lachaise, j'ai assisté, dans la Chaussée-d'Antin, au dé61é d'une compagnie de hussards, menant à Versailles, comme prisonniers, des soldats, qui, ayant levé la crosse en l'air, à Montmartre, le 18 mars, avaient passé à l'insurrection ces hommes marchaient tête basse, au pas, entre les hussards. En signe de dégradation on avait retourné leur tunique. Or, sur les trente ou quarante bons bourgeois qui assistaient, avec moi, au moment de ce dénié, je me souviensque les trois quarts ont invectivé les prisonniers de la belle façon. Le dernier quart sortait du restaurant Bignon et, ne pouvant pas crier, ayant la bouche pleine, se consolait en invectivant du geste. Je connaissais une bonne partie de ces amis indignés de l'ordre et je me permis d'insinuer à l'un d'eux qu'il vaut peut-être mieux ne pas dire de choses désobligeantes à des prisonniers. Je fus presque traité de communard pour cette simple bbservation. Or, parmi ces trente ou quarante échauffés d'alors, j'en pourrais citer une bonne vingtaine, encore vivants, qui, entre M. Grousset et un royaliste, n'hésiteront pas à voter aujourd'hui pour le premier. Est-ce par peur? Non. Mais il est probable que, pour eux, le temps a fait son oeuvre d'apaisement. Ils ne voient plus la Commune sous le même angle....