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Le Globe, 14 août 1827

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Le Globe
14 août 1827


Extrait du journal

ITALIE. UNE SCENE DU ROMAN DE MANZONI. ( Suite du dernier numéro. ) Nous comptons sur l'impression qu’aura pu laisser à nos lecteurs le commencement de cette scène, que nous j avons été, bien à regret, forcés de diviser en deux articles. Si elle est frappante, en etfet, c’est surtout par son unité, 1 par cct art plein de vérité et de naturel avec lequel tou tes ses parties se répondent et s'enchaînent, et qui, met tant pour ainsi dire la vie intérieure en relief, fait sortir une succession d’événements d’une succession de pensées. Car voyez par quelle progression insensible s’opère la con version de cet homme couvert de crimes, de cet Inconnu, \ que l’auteur a eu soin cependant de nous montrer plutôt comme perverti par scs malheurs et par l’orgueil qu’en- I traîné au mal par un penchant de sa nature. D’abord le changement de son cœur n’est rien ou peu de chose : il commence par s’étonner que la pitié ait pu entrer dans l’âme d’un de scs sbires, qui ne la connut jamais, et il veut voir la jeune fille dont la douleur a pu produire cette merveille. Après qu’il l’a quittée, le sommeil le fuit; il sc demande pourquoi il fait souffrir cette malheureuse; et, voulant s’en rendre compte, il sc trouve entraîné à l’exa men de sa vie tout entière. Il y a ici une analyse profonde du remords : toutes scs actions criminelles lui apparais sent dépouillées des motifs qui les avaient déterminées; le désespoir le prend donc, et il veut se tuer ; mais l’idée d’une autre vie l’arrêtes; et cependant l’avenir ne lui offre plus qu’un vide pénible. De là l’impression produite sur lui par cette vive allégresse que répond dans tout le pays l’arrivée du cardinal Borromée; il veut voir cct homme qui exerce un empire si différent du sien ; il veut le voir, et il va luimême subir sa puissante influence : Le chapelain ouvrit la porte, et introduisit l’Inconnu. Frédéric s’a vança à sa rencontre d’t.n air joyeux et empressé , les mains étendues eu avant, comme vers quelqu'un qu’il attendait ; puis il fit signe de sortir au chapelain qui obéit sur-le-champ. Tous deux restèrent pen dant quelques instants silencieux et incertains de ce qu’ils devaient taire. A la fin, le cardinal rompit le premier le silence : « Oh ! dit-il avec i) chaleur , quelle agréable visite c’est pour moi que celle-ci ! Com» bien je vous dois de reconnaissance d’une pareille visite , et d’au» tant plus qu’elle est pour moi comme un ri proche! — Un repro» che! s’écria le seigneur étonné mais rassuré par ces paroles et con- | • lent que le cardinal eut rompu la glace et entamé la conversation.— jj r Certainement, c’est un reproche pour moi, reprit le cardinal, pour }i » moi qui me suis laissé prévenir par vous, lorsque depuis si long- ( » temps, et tant de fuis, j’aurais pu, j’aurais du aller vous trouver. —• li » Venir me trouver, vous! Savez-vous qui je suis? vous a-t-on bien ij » dit mon nom ? — Et cette joie que j éprouve , et dont mes traits Ij « vous offrent sans dentelle témoignage , pensez-vous que je dusse la ! » ressentir à l’annonce, à la visite d’un inconnu? C’est vous qui me ij » la faites éprouver ; vous , vous dis-je , que j aurais dû aller cher-...

À propos

Fondé en 1824 par Pierre Leroux (1797-1871) et Paul-François Dubois (1793-1874), Le Globe a traversé plusieurs phases très distinctes : de publication strictement littéraire, la rédaction – regroupant plusieurs universitaires – s’est peu à peu intéressé à la politique et à l’économie, via le saint-simonisme.

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Données de classification
  • borromée
  • italie