PRÉCÉDENT

Le Globe, 22 novembre 1843

SUIVANT

URL invalide

Le Globe
22 novembre 1843


Extrait du journal

PARIS, 21 NOVEMBRE. Nous ne savons comment expliquer la résistance que le conseil municipal de la ville de Paris oppose au projet du gouvernement relatif à la création d’un conseil de prud’hommes. Les ministres du commerce qui se sont succédé depuis cinq ans se sont occupéts , avec une sollicitude égale, du soin de doter Paris de cette institu tion dont l’urgence a été solennellement reconnue a la tribune, sans avoir pu réaliser encore le vœu le plus cher des industriels , des contre-maîtres et des ouvriers de la capitale. Si l’institution des prud’hommes n’était en France qu’à l’état de théorie , nous com prendrions , en l’excusant, l’hésitation bien naturelle des conseil lers municipaux à la voter ; mais il est démontré, au contraire, que la création de ce tribunal arbitral,dans les centres commerciaux de I l France, et notamment à Lyon, peut seule maintenir les rapports bienveillans du maître et de l’ouvrier, et rendre, sinon tout-à-lait impossibles, du moins chaque jour plus rares,ces coalitions funes tes qui, en lia de compte, ruinent le négociant et laissent la classe ouvrière sans pain et sans secours, livrée aux suggestions des mau vaises passions politiques. On se rappelle que, à la tin de la session dernière, M. Terme, maire de Lyon, nommé président de la commission chargée d’exa miner le projet du gouvernement sur la création d’un conseil des prud’hommes, émit une opinion entièrement favorable à ce pro jet ; qu’il en lit ressortir les avantages de toutes sortes, soit pour la plus grande facilité des transactions industrielles, soit pour l’éco nomie des frais judiciaires en matière commerciale. M. le ministre du commerce appuya vivement l’opinion émise par M. Terme, au nom de la commission. Mais ce qui aurait dû rassurer complète ment les hommes habitués à faire de l’opposition quand même aux projets les plus sages présentés par le gouvernement, c’est que, dans toute celte affaire, le ministère, aussi bien que la commission, ne parlait pas seulement en son nom, mais encore au nom de la chambre de commerce de Paris. C’est, en effet, à la chambre de commerce que semble appartenir l’initiative du projet ; c’est sur sa demande que M. Cunin-Gridaine, ministre du commerce, dans le cabinet du 1*2 mai , nomma , eu 18-10 , une commission chargée de préparer un projet pour la création d’un conseil des prud’hommes. Le plan de la commission fut parfaitement accueilli par la chambre de commerce, ainsi que par une nouvelle com mission choisie par M. le préfet de la Seine, et composée de membres de la chambre du commerce et du conseil municipal. Le conseil municipal, auquel le projet des deux commissions fut soumis en dernier ressort, l’approuva sans restriction, et néan moins, depuis ce temps, malgré les garanties de sagesse et de prévoyance qu’offre un projet élaboré avec ce soin et cette matu rité, le conseil municipal ne se hâte pas de satisfaire, par un vote définitif, à un vœu généralement exprimé, et de créer un tribunal qui règle promptement et sans frais les rapports du maître avec l’ouvrier. Pour obéir à son habitude de dénigrement systématique , une partie de la presse radicale a naturellement approuvé la lenteur qu’apporte le conseil municipal à rendre la décision qui lui est demandée. Le National, ennemi de toutes les améliorations maté rielles, de la nature de celles qui veulent donner du bien-être aux classes pauvres avant de leur accorder des droits, encourage le conseil municipal à persévérer dans ce système de temporisation. La raison au moyen de laquelle le National colore aujourd’hui l’in différence dont iï fait preuve envers le vrai peuple , celui qui tra vaille au lieu de lire les journaux; le prétexte sur lequel il se fonde pour ajourner line institution vraiment démocratique, c’est que le décret de 1809, qui règle les attributions du conseil des prud'hom mes et le mode de nomination de ses membres, n’est pas assez libéral et donne une trop grande majorité au maître, aux dépens de l’ouvrier. Supposons qu’on réformât le décret de 1809, en ce qui concerne la prétendue injustice signalée par le National, et qu’on n’accordât aucune prépondérance de suffrages au fabricant comme à l’ouvrier, est-il bien certain que le National se contente rait de cette demi-réforme, et qu’il ne voulût pas la contre-partie...

À propos

Le Globe était un quotidien guizotiste dirigé par Adolphe Granier de Cassagnac, partisan d’une monarchie tempérée par une Constitution et deux chambres. Journal politique défenseur de la Monarchie de Juillet et du suffrage censitaire, il fut publié de 1837 jusqu’à 1845. Cette tribune politique orléaniste sombra peu avant la chute de Guizot, trois ans avant la Révolution de 1848 et la fin de la Monarchie en France.

En savoir plus
Données de classification
  • terme
  • de châteaubriand
  • abis
  • napoléon
  • colonies
  • paris
  • france
  • bordeaux
  • lyon
  • la seine
  • nemours
  • enghien
  • angleterre
  • londres
  • bonaparte
  • conseil de prud'hommes
  • bt
  • s. a.
  • ecole polytechnique