Extrait du journal

J'éprouve la joie profonde que (ont naître la rencontre et la méditation d'un chef-d'œuvre. M. le docteur André Curtil vient de consacrer aux Aveugles un livre émouvant, où la raison se réchauffe au souffle du sentiment et s'anime de toutes les grâces du rêve. Et c'est, d'abord, un magnifique poème en l'honneur de la lumière, océan clair où nous baignons et dont les ondes jaillissent sans fin de leurs sources sacrées : lumière hésitante de l'aube, lumière exaltée de midi qui vient poursuivre et enlacer chaque atome, lumière apaisée du soir qui, sur un dernier baiser, nous quitte, « mettant un sourire de feu sur chaque mot d'adieu ». Un lyrisme qu'on dirait inspiré de Lucrèce ou emprunté à Maeterlinck soulève cet éloge de la lumière considérée comme le principe de toute vie physique et de toute vie morale, célèbre les cadences du fluide impondérable, décrit le mystère des. yeux, « filtre étonnant fait d'azur, d'eau claire et de neige transparente », et, dans les frémissements incessants du regard, discerne toutes les nuances de l'union merveilleuse de l'homme avec l'univers, tel au moins que nos faibles sens nous per-...