Extrait du journal

pieds nus, les bras et la gorge nus sous son étroit waterproof décroché au vol dans l'en trée, avec son méchant petit jupon en loques, elle descendit l'escalier comme une folle. Elle fut vite dans la rue. Sans voir une ombre qui se détachait du mur à son aspect, sans entendre l'exclama tion éperdue que son coutume faisait pousser à celui qui était là, Pauline, en courant à perdre haleine, dévalait par Ta rue Lepic. Il tombait une pluie fine, glacée. L'obscurité était profonde, il n'y avait pas un chat dans les rues. Les boulevards extérieurs, la rue Blanche, la. Trinité, la Chaussée-d'Antin, la rue de la Paix furent vite franchis. Encore quelques pas, et la malheureuse fille arriva au coût de la rue Castiglione, mais là un obstacle auquel elle n'avait pas pensêTarrêta-net : la grille des Tuileries, en effet, lui barrait la course, étant fermée. Elle regarda à droite, à gauche .comme une bête acculée qui se sent poursuivie. Poursuivie... Elle l'était, vraiment. Quelqu'un courait derrière elle d'une course aussi folle, aussi effrénée que-la sienne, sans cependant arriver à rattraper l'avance qu'elle avait prise dès la rue Lepic. Pendant quelques minutes la malheureuse fille demeura droite, comme privée de raison, devant la grille qui se dressait froide et noire devant elle, n'ayant plus conscience même de ce qu'elle avait résolu de faire, ne sentant pas la pluio qui l'inondait jusqu'à la moelle des os, mettant toute sa. volonté, toute sa force à secouer rageusement de ses mains ensanglantées le fer rigide qui lui résistait. Tout à coup usa y ois. très douce prononça...