Extrait du journal

— Vous me promettez de tout dire? — Je vous le jure. Reposez en paix, mon vieil ami; moi je veille. Quelques jours s’écoulèrent pendant les quels le mieux fit de rapides progrès. Avec ses forces, M. Grandchamp recouvrait sa raison et le souvenir des choses passées, semblable à ces roses de Jéricho qui, dessé chées , mortes, renaissent peu à peu et finissent par s’épanouir quand on les plonge dans l’eau, revivait en lui et. lentement, se précisait. Sans attendre que Lauraguais lui rappe lât sa promesse et lui posât de nouvelles questions, le vieillard, allant au-devant de son désir, lui raconta les événements qui suivirent l’arrivée à Marseille de Julie Barteuil et l’enlèvement de Nao. — Que s’est-il passé, lui dit-il, après mon arrestation à Saint-Etienne et le moment où Je me suis retrouvé ici, comment m’y suisje rendu, â quel appel mystérieux ai-je alors obéi? C’est ce qu’il m’est impossible de vous dire, car il semble qu’un voile soit jeté sur ces quelques mois de mon existence et tous mes efforts pour le déchirer sont de meurés inutiles. Mais je me souviens très nettement de mon arrivée à Marseille. J’avais fait la route ou tout au moins une partie de la route à pied ; j’étais vêtu de haillons et n’avais, pour toute fortune, que quelques pièces de monnaie. J’ignorais que ma femme se fût rendue...