Extrait du journal

. Voilà donc le Monténégro rayé défini tivement de la liste des nations. Un com muniqué, bref et tranchant, nous l’a annoncé ces jours-ci. Pas d’appel. Pas de recours en grâce. La mort sans phrases. . Esit-il, au moins, certain que la défense de l’accusé ait été assurée ? En aucune façon. Les Alliés observent une réserve extrême, excessive même, car il est inhabile de faire trop bon marché de l’opinion publique qui aimerait la lumière en cette affaire, comme en tou tes autres. On se demande pourquoi les gouvernements de l’Entente qui, prisjsolément, s’honorent de manœuvrer*" au grand jour, pratiquent, dès qu’ils opè rent ensemble, la politique occulte. Ils accréditent ainsi* les fausses rumeurs ; ils autorisent les suspicions ; ils permet tent qu’on croie, — ce qui est manifeste ment faux, — que le Monténégro a été sacrifié à la convoitise de la Serbie. Des considérations d’un ordre plus élevé, — et plus relevé, — ont, certes, déterminé la grave résolution qui a été prise. On ne saurait en douter si l’on veut bien se rap peler qu’un des chefs d’Etat qui s’y sont associés, le roi d’Italie, n’est Ÿien moins que le gendre du souverain dépossédé. A ce dernier, on a reproché d’avoir, — au cours des hostilités, — signé une paix séparée avec l’Autriche ; il s’est défendu en alléguant que, placé avec son armée, sous l’autorité du commandement serbe, il était irresponsable des événements sur venus en dehors de lui. Aucune enquête contradictoire n’ayant été ordonnée, les faits n’ont pas été éclaircis. Mais en admettant l’indignité du vieux Nico las Ier, cette indignité entraîne-t-elle celle de son peuple ? Je sais que divers Monténégrins de marque, — dont le nombre n’atteint pas la demi-douzaine, — ont rédigé et signé, à Genève, en 1917, un manifeste stigma tisant les fautes impardonnables de leurs dirigeants, fautes qui mirent leur pays dans l’impossibilité de mener la lutte jusqu'au bout et le privèrent de prendre une part digne de son passé dans cette guerre de libération des peuples. « Il est notoire, ajoutaient les signa taires, que le Monténégro n’a jamais pu, par ses propres moyens, se développer économiquement et mettre de l’ordre dans ses finances. A cause de cela, il n’était pas capable de réaliser, ni d’as surer le bien-être nécessaire à sa popu lation, à laquelle les garanties civiles et politiques n’étaient pas accordées. A la fin de cette guerre de destruction, les besoins de PËtaf seront bien supérieurs à ce qu’ils étaient auparavant et ses reve nus seront moindres, de sorte qu’on finira par se trouver dans une situation sans issue. >Après ces arguments d'ordre pratique, le manifeste concluait nettement à l’union du Monténégro, de la Serbie et des pays croates et Slovènes en un Etat unique et indépendant. Ce document n’a qu’un tcfrt, c’est de porter la signature de cinq personnages dont on a quelque raison de suspecter l’impartialité. Tous les cinq,.— anciens ministres ou hauts fonctionnaires mon ténégrins, — ont eu à souffrir cruelle ment des abus de pouvoir de Nicolas Ier ; ils ont été impliqués, sans motif avoua ble, dans une histoire de complot, jetés en prison et juges sans justice, par ordre de. leur souverain. S’ils manquent de sérénité, c’est bien leur droit. Je citerai, sans y insister, un autre argument qu’on a. basé sur une prêten-...