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Le Petit Marseillais, 14 avril 1892

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Le Petit Marseillais
14 avril 1892


Extrait du journal

güESTiaa CE CRISES Il ne suffît pas de faire de bonnes choses ; il faut encore les faire à propos. il parait que c’est une bonne chose de détruire un ministère ; mais il est peutêtre maladroit de faire cette besogne quinze jours avant le 1er mai. Le ministère vient de naître. Il a eu le temps de dire des bêtises, mais il n’a pas eu le temps d’en faire. On devrait le laisser un peu mûrir. A l’heure où j’écris, on est en train de l’abattre. Je ne sais pas si on réussira, le n’ai pas besoin d’attendre la fin de la séance pour vous dire mon opinion, parce que c’est une opinion générale, que le résultat ne peut modifier. Si on conserve le ministère, il ne fallait pas l’attaquer comme on l’a fait et le mettre à deux doigts de sa perte. Si on le chasse, je déclare hautement qu’on devait et qu’on pouvait attendre le mois prochain. Il y a très peu de crises qui ne puis sent être ajournées et peut-être, si l’on se mettait à a journer les crises, on s’habi tuerait, d’ajournement en ajournement, à garder le ministère qu’on o. Les députés croient que ce serait un grand mal ; la France, suivant eux, aime à passer de main en main. M. Loubet qui est né le dimanche gras, a déjà régné six semaines. La France, disent les députes, commence à trouver que c’est bien long. Mais ce sont les députés qui trouvent cela. Le mandat législatif est à leurs yeux une valeur à lots, dont ils aiment à multiplier les tirages. La France n’est pas du tout de leur avis. Elle voudrait être bien gouvernée ; ou plutôt, elle voudrait être gouvernée ; et avec ces ministres qu’on ne fait que lui montrer, sans lui donner le temps de les tâter et de les étudier, elle se sent dé semparée comme un navire sans bous sole. Elle a mal Accueilli la crise de février; c’est un tait incontestable. Cette crise est survenue un beau jour, sans être atten due ni préparée. M. Constans était à son banc, où il faisait un bon somme, pen dant qu’on le démolissait à la tribune. Il a découvert, en se réveillant, qu’on ve nait de le rendre à la vie privée. H était même, sans savoir pourquoi, et sans que personne sût pourquoi, plus battu que ses collègues; et la preuve, c’est qu’ils sont tous rentrés, ou presque tous, et qu’il est resté sur le carreau. En venant à la Chambre à 2 heu res et demie, il était le vrai chef du ca binet ; il en était la force. On disait : « Nous avons Constans. » C’était le dé brouillard par excellence. Rien ne l’é meut, rien ne le trouble, disait-on ; et surtout, rien ne l'effraie. Tout ce qui fait pâlir les autres ministres, un discours de Clémcnceau, un échec au Tonkin contre les pirates, une émeute dans une église, une grève d’ouvriers ou de co chers, tout cela est pour lui comme ces menus obstacles qu’un bon cavalier franchit sans cravache ni éperon, avec un simple appel de langue. A 4 heu res, après le scrutin, on sc demandait partout : « Qui prendra sa place? » C’est Loubet qui l’a prise. Le roi est mort : Vive le roi ! Voilà l’oraison funèbre d’un grand ministre. Le public s’est plaint, en février, du temps qui s’est écoulé entre la démis sion et le remplacementt II aurait voulu un nouveau ministère dès le lendemain du vote, pour ne plus avoir à y penser....

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

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