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Le Petit Marseillais, 16 mai 1937

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Le Petit Marseillais
16 mai 1937


Extrait du journal

n s'cst souvent demandé si la Fiance a réellement une politique extérieure et, dans le cas où elle en aurait une, quel en serait le sens. Notre ministre des affaires étrangères serait peut-être lui-même fort embarrassé de répondre. S'il a des desseins formels, il les tient bien cachés, car on a l'impression, depuis que le Front populaire est au pouvoir, dune politique a l'aveuglette, d'une diplomatie à la petite semaine. Nos affaires avec l'Allemagne n’ont pas fait un pas ; nos rapports avec l'Italie sont, pourrait-on dire, frigorifiés, depuis que nous avons eu, dans la question éthiopienne, une attitude équivoque. Même lorsque cette question est réglée par la victoire des armes, noos persistons à n’avoir pas d'ambassadeur à Rome, sous le prétexte que ce serait reconnaître le caractère impérial de la conquête italienne. Attitude aussi puérile que maladroite et que l'Angleterre, sur laquelle nous prétendons nous modeler en tout, s’est bien gardé.e d'adopter, car elle n'a jamais cessé d'être représentée dans la ville éternelle et si ses intérêts sont en cause, elle ne consentira jamais à la bouderie diplomatique que nous prolongeons. Pendant que notre pays a le sentiment d'être tour à tour un instrument continental aux mains de l’Angleterre et une dupe de la Russie commu niste à laquelle nous avons livré notre économie nationale, nous voyons les peuples dont nous négligeons la force et méconnaissons l'évolution, nouer entre eux de solides liens militaires et sociaux. Les négociations ouvertes entre l’Allemagne et l'Italie, les conversations poursuivies entre les hommes d'Ktat de ces deux puissances ne Lussent aucun doute sur l’activité de pourparlers internationaux d’où nous sommes exclus. Longtemps on a pu croire que ces visites et ces manifestations avaient un caractère seulement préparatoire. Aujourd’hui, après le déplacement du vicechancelier (ioering. les déclarations des gouvernants d'Autriche et de Hongrie et le discours si mesuré du comte Ciano à la Chambre italienne, nous avons la certitude d'une action commune qui n'est pas nécessairement dirigée contre nous, mais qui pourrait le devenir si nous n’apportons pas à ce concert de la solidarité européenne, un concours nettement débarrassé des influences soviétiques. IL se peut que le fameux axe Berlin-Rome fasse à quelques-uns l’effet d’un slogan tout au plus bon pour les chancelleries. La vérité est que les intérêts matériels et moraux de l’Allemagne et de l’Italie se rejoignent dans la mesure où nous ne savons pas nous entendre économiquement avec la première et méditerranéennement — qu’on nous pardonne cet affreux mot — avec la seconde. Kn Italie, on a dit une chose très juste: « Ce n’est pas notre faute si nous nous trouvons géographiquement sur le chemin tle l'Angleterre vers ses colonies ». Nous y sommes aussi nous-ntême sur ce chemin. Pas plus que l'Italie, et elle l a déclaré nettement, n’entend gêner l'Angleterre sur ses routes terrestres et maritimes, nous n'avons nous-mêmes ce projet. Ces résolutions sont donc des gages tle paix réciproques. Mais on conçoit que l'Italie désirerait, dans ce problème et quelques autres, être sûre tle notre sympathie agissante. Nous ne faisons rien pour cela, ou du moins nous ne faisons que ce qui est conforme aux décisions et suggestions britanniques. ol'S ne sommes devenus neutres en Espagne que lorsque l’Angleterre l’a voulu expressément. F^t aujourd'hui encore, dans les nouvelles contra dictoires de la guerre civile en Espagne, nos blâmes, directs ou indirects à l'Allemagne et à l'Italie, inspirés à la fois par les directives anglaises et le terrorisme ibérien, marquent une singulière dépendance à l'égard de ces inspirations accouplées. ■ i .. Où cela peut nous conduire, nous n'en savons rien et nous n’avons pas l'aïr de chercher à le savoir. ‘ Le malheur est que hors, de ches nous on suit-Arès bien, par contre, ce que l’on veut et où l’on veut aller. Les nations continentales qui jouissent d’une discipline solide et d’un régime qui ne s’abandonne pas, ont des affinités que nous voyons se réaliser et qui s'affirmeront davantage encore, tandis que notre déliquescence ira s’accentuant. Nous ne demandons pas un Richelieu ni même un Talleyrand pour rendre ?i la France le prestige qu’elle a perdu, car il ne faut pas songer à l’impossible. Mais il y a des milliers de Français qui souhaitent que leur pays n’aille pas à la dérive vers les écueils extérieurs et qui sc • contenteraient d’un pilote moyen, expérimenté, vigilant. Où est-il ?...

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

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