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Le Petit Marseillais, 25 juillet 1926

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Le Petit Marseillais
25 juillet 1926


Extrait du journal

gnent sur ce sentiment corse de la mort, l^e disparu vit auprès du vivant, en sa tombe familiale, au milieu du champ paternel ; il n’est pas apaisé tant qu’il n’est pas vengé ; tuer son ennemi, c’est lui faire du bien ; cet acte de haine est encore un acte d’amour. J’ai lu bien des poèmes en bien des langues antiques et modernes ; j’en ai lu peu qui soient de la force et de la qualité de ces chansons corses, écloses spontanément dans des villages, sur des lèvres de fem mes ou de bergers illettrés. La poésie pure, dont on a beaucoup parlé cet hiver en termes alambi qués, la cherchent en des textes laborieux de poètes érudits, la voici, toute simple et toute natu relle, ardente et fraîche à la fois, comme l’eau des fontaines qui coulent sous les châtaigniers cor ses, dans la grande lumière de l’été. Peu de chansons d’amour, dans un pareil recueil, comme dans la tradition de l'île. Il semble qu’une certaine pudeur empêche l’âme corse d’exprimer à haute voix de tels sentiments, tant que l’on est heureux. Mais cet amour, discrè tement caché dans la joie, reprend tous ses droits devant la mort. Alors il se dresse, il s’exalte, il chante un chant ardent et funé raire, digne du Cantique des Can tiques. « Je danse autour de vous, je vous caresse de mes mains. Vous étiez mon mari, vous étiez mon espérance, ô mon Petru Francescu, la source de tous mes maux 1 Vous étiez mon navire en hante mer et tout prêt à aborder. Vous étiez mon cyprès touffu, mon raisin muscat, ma pâte sucrée, ma manne douce et belle... Vous étiez mon orange sanguine, ma parure la plus rare, ma coupe d’argent tout inscrustée d’or ; mon plat seigneurial, mais comblé de ma douleur : » Ainsi chante une femme sur le cadavre de son mari. Fl de tous côtés, autour des morts, s’élèvent sur la vieille terre de Corse de pareils accents d’amour et de détresse. Fidèle, oui, fidèle à ceux qui ne sont plus, ce qui est la plus noble forme de la fidélité, cette race prouve ce grand sentiment de tendresse funéraire par son culte des tombeaux, ces tombeaux isolés sur une colline ou dans un creux de vallon, entourés de cyprès, fleu ris de géraniums, où le repos éter nel doit être doux au chant des belles fontaines ou des flots médi terranéens, qui font autour de la Corse, une ceinture d’harmonie et de lumière. EMILE RIPERT....

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

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