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Le Petit Marseillais, 27 août 1907

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Le Petit Marseillais
27 août 1907


Extrait du journal

Dans le quartier Juif, — le Mellâti — lé même désordre règne. Des meubles éventrés encombrent les rues, et, comme les cadavres furent nombreux dans ces parages, une odeur pestilentielle plane au-dessus du quartier. Le voisinage trop immédiat des habitations eu ropéennes n’a pas permis à l’artillerie de dé truire le quartier arabe qui se trouve au-des sus du Mellah. Il est habité par l’Arabe pau vre, homme primitif qui construit sa maison en chaume et en cimente la base avec de la bouse de vache. Toute la haine du musulman contre le « roumi » est enfermée dans les yeux de ces gens-là. L’homme a le regard bestial et méchant ; la femme semble vouloir mor dre ; l’enfant lui-même est menaçant ; — tous ont l’air de dire : — Nous vous ferons payer un jour la mort de nos frères !... Et, ma foi. nous avons dû traverser ce quar tier, le revolver au poing, tant il y avait je ne sais quoi de désagréable dans les regards sombres de ces dangereux voisins... Par la porte de Marakech, nous regagnons le quar tier européen ! Pauvre quartier européen 1 On l’a bien arrangé I... Toutes les maisons ont été visi tées ; dans les rues sont jetés pêle-mêle les meubles et les livres de compte. Le désir de voler ne poussait pas seul les pillards, qui se sont livrés à d’odieux actes de vandalisme, brisant les glaces, éventrant les matelas ; — et les coffres-forts ont eu leur part de misère 1 Les sucres et les thés déposés à la douane ont été emportés, ainsi que les soieries et les cotonnades, — et dans les environs du port où des sacs d’orge étaient empilés tous ont été éventrés et dispersés, de sorte que, à l’heure actuelle encore, dans les rues de la basse ville, on s’enfonce jusqu’à mi-jambe dans l’orge. Le résultat de ces exactions est que la vie est devenue très difficile à Casablanca. On y mange comme on peut, quand on a la chance d'y manger... Les hôtels demandent des prix fous à ceux qui sont obligés de se faire égor ger pour être mal traités. Depuis aujourd’hui seulement, il y a de la viande et de la farine à Casablanca ; avant cela, on mangeait du pain de semoule et de la soupe d’orge et de pommes de terre ; on ne trouve ni plumes ni encre en ville, — si ce n’est au consulat ; — tout ce qui était chez les commerçants ayant été brisé ou brûlé... Des cartes postales ? Il n'y faut pas songer. De l’eau ? Comme on a jeté des cadavres dans les citernes, on évite d’en boire, et l’on a été heureux de trouver, à bord des navires de commerce, des caisses d’eau minérale précieusement mises de côie. La plus grande misère règne dans le pays. Les Européens s’entr’aident ; mais les Arabes restés à Casablanca ne savent pas toujours comment manger.......

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

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