Extrait du journal

DE PARIS UNE AVENTURIERE On est 'en train d'emménager l'ancienne éoolé religieuse de la rue de Madrid pour y installer le Conservatoire .il est un autre projet déposé à plusieurs reprises sur le bureau du conseil municipal et qui intéressera une bonne partie des Parisiens il consiste à transporter la mairie du huitième arrondissement dans une admirable demeure située presque au rond-point des ChampsElysées, occupée aujourd'hui par un club, mais qu'on ne cesse de nommer, comme autrefois, l'hôtel de la Païva. C'est. en vente, un des hôtels modernes les plus somptueux de Paris il fut composé sur les plans d'une femme qui défraya longtemps la chronique mondaine du Second Empire. Son existence est un roman d'aventures palpitant et tragique. qui prouve chez son héroïne une volonté et une absence de scrupules également rares. Une fois- parvenue à la fortune, la marquise de Païva se plaisait à raconter des histoires extraordinaires sur sa jeunesse: elle se disait ispue d'une lignée princière en réalité, elle était née à Moscou, dans une pauvre famille d'ouvriers. C'était une juive dont le vrai nom était Thérèse Lachmann elle épousa., très jeune, un petit tailleur français établi dans sa ville natale François Villoing, dont elle eut un enfant. Mais, se sachant belle, désireuse dé tenir une place dans le monde, elle s'enfuit, de Moscou pour venir a Paris. Voilà notre petite ouvrière juive. dans la grande ville elle y arrive, exténuée, presque mourant de faim elle tombe d'inanition sur' un banc de l'avenue des Champs-Elysées. Quand on la relève, elle murmure, en désignant du doigt l'emplacement qui est devant elle « Là où la faim m'a terrassée s'élèvera un hôtel où s'affirmera ma puissance! » C'est cette volonté qui soutiendra Thérèse t'illoing. dans ses plus affreux jours et elle en connut. Elle vécut trois ans dans un petit hôtel, la pensée tendue vers cette fortune qui tardait à venir Elle montrait, un jour, un flacon rempli de poison à Théophile Gautier, décidée à s'en servir si elle ne réussissait pas; c'était la 'victoire .oiriarnort. Enfin, la fortune commença par lui sourire: elle fit la connaissance d'un pianiste célèbre, Henri Herz, et grâce à lui elle entra dans le monde des artistes, peintres et littérateurs, sur lequel elle voulait régner. Herz, presque ruiné par Elle, partit pour l'Amérique, où il donna une série de concerts. Le plus 'dur était fait. Thérèse Villoing comptait des adorateurs, des amis elle devint vite une des femmes les plus en vue de Paris, qu'elle étonna par son luxe et ses aventures retentissantes....