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Le Soleil, 14 mars 1882

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Le Soleil
14 mars 1882


Extrait du journal

PARIS, 13 MARS 1882 LE MÉTROPOLITAIN Je ne crois pas beaucoup m’éloigner de la vérité en affirmant que. sur les trente mille Parisiens qui achètent tous les matins le Soleil, il y en a mille à peine auxquels leur position de fortune permet de se donner quotidiennement le luxe d’une voiture au mois, à l’heure ou à la course, quatre mille qui ont un dédain superbe pour toute espèce de véhicule et ne font jamais usage que de leurs jambes pour se rendre à leurs affaires ou à leurs plai sirs, et vingt-cinq mille qui sont dans mon cas, c’est-à-dire qui sont très satis faits d’avoir à leur disposition, surtout les jours de pluie, les moyens de circuler rapidement et à bon marché. C’est à cette dernière portion de nos lecteurs que notre collaborateur H. de Kerohant s’est adressé, quand il a vanté, dans son article du 9 mars, la commodité et les charmes du chemin de fer métro politain dont on projette la construction. Avoir un logement peu coûteux et dans un air pur, derrière le bois de Boulogne ou à proximité du parc de Saint-Cloud, et pouvoir se faire transporter tous les jours en une demi-heure pour la modique somme de dix centimes avant sept heu res du matin, de vingt centimes à partir de sept heures, aux Halles-centrales ou dans le faubourg St-Antoine, c’est là une combinaison très séduisant^ au premier abord, mais dont la réalisation coûtera terriblement cher. On fera le chemin de fer métropolitain au moyen des ressources qu’on se pro curera à l’aide d’une émission. Cette émission atteindra un chiffre très élevé. D’après les calculs les plus modérés, il fau • dra réaliser un capital de deux cents mil lions de francs. Ce n’est sans doute pas aux marchés de Londres ou de Vienne, pas même aux marchés de Lyon ou de Bor deaux, mais surtout à la place de Paris, qu'on fera appel ; ce sont les habitants de Paris qu’on sollicitera, avec le tam-tam ordinaire des réclames, des prospectus et des boniments financiers. Donc, en cette affaire, à côté de la si tuation du voyageur parisien, il importe de voir la situation de l’actionnaire pari sien, de cet actionnaire auquel on ne rend pas l’argent quand il est mécontent. Nous n’avons aucun parti-pris de dé fiance ou d’hostilité contre les promoteurs de l'entreprise du chemin de fer métropo litain; au contraire, nous désirons que cette entreprise soit menée à bien; c’est pour cela qu'il nous paraît désirable qu’on ne s’en gage pas dans une aussi grosse opération, une opération qui porte sur une somme de deux cents millions, sans avoir des éléments de calculs très précis donnant la certitude que le capital souscrit sera Rémunéré d’une façon suffisante. Nous n’en sommes pas encore là elles évaluations qu’on a faites jusqu’à pré sent des recettes et des dépenses proba bles sont quelque peu fantaisistes. En outre, est-on sûr que ce n’est pas une conception fausse de débuter par l’éta blissement de la ligne de Saint-Cloud à la gare de Lyon ? On calcule que cette ligne, passant par les grands boulevards, traverse Paris là où la circulation a la plus grande activité ; et l'on se fonde sur ce raisonnement pour affirmer que c’est sur cette partie du réseau qu’on pourra faire le plus gros chiffre de recettes : on ne ré fléchit pas que c’est également là qu’on aura à dépenser le plus d’argent, parce qu’>l faudra voyager souterrainement sur une grande partie du parcours et que les terrains pour la construction des gares de voyageurs, — qui devront être très nom breuses, —coûteront excessivement cher. Nous inclinerions à croire que dans l’intérêt des futurs actionnaires du Mé tropolitain , comme dans l’intérêt des voyageurs, il faudrait commencer, non par rétablissement d’une ligne parallèle, Biais par l’établissement de lignes per pendiculaires aux grands boulevards et à la Seine. Au lieu de faire au début la voie ferrée allant de Saint-Cloud à la gare de Lyon, on pourrait construire des lignes qui, partant du centre de Paris, seraient prolongées au nord dans la direction de l'agglomération d’Aubervilliers, au sud dans la direction de l'agglomération de Villejuif. En procédant de cette façon, on accomplirait, ce me semble, avec une dépense moindre, une œuvre plus utile pour les populations de commerçants et d’ouvriers de la banlieue et des environs de Paris. C’est un point qui vaut la peine d’être examiné. Si, laissant de côté ces détails qui ne sont pourtant pas sans avoir une grande importance, nous étudions dans son en semble l’affaire du chemin de fer métro politain, nous constatons que l'entreprise devra donner, pour la rémunération d'un capital de deux cent millions de francs, au taux de 5 o/o, dix millions de frauos do bétiéticesjietee...

À propos

Fondé en 1873 par Édouard Hervé, Le Soleil était un quotidien conservateur antirépublicain. Avec son prix modique, il cherchait notamment à mettre la main sur un lectorat populaire, audience qu'il n'arrivera toutefois jamais à atteindre du fait de ses orientations politiques. Le succès du journal fut pourtant considérable à une certaine époque, tirant jusqu'à 80 000 exemplaires au cours de l'année 1880.

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