Extrait du journal

Un drame passionnel qui vient d’avoir son dénouement devant •a cour d’assises de la Seine, montre sous un jour peu flatteur l’état des mœurs dans la société actuelle, et surtout en quelles mains est tombée la défense de l’ordre public. A la suite d’une scène de jalousie, une femme mariée tua la maîtresse de son mari et le jury vient de l’acquitter. Si fâcheux qu’il soit le fait s’explique ; mais ce qui ne s'explique pas, c’est le réquisitoire de l'avo cat général chargé de demander une con damnation contre l’accusée. Cet avocat général, dont le nom mérite d’être retenu, s'appelle M. Fournier ; il a demandé une condamnation moins parce que l’accusée avait tué sa rivale que parce qu’elle n’avait pas tiré vengeance en frap pant son mari. J’avoue que je ne comprends pas très bien. Il me semble que M. Fournier a requis dte manière à faire acquitter ta prévenue qu’ft a représentée comme n’étant point indigne de pitié et il a, d’alMeurs, parfaitement réus si. L’on s’expliquerait, dans «ne-certaine me sure, le réquisitoire de M. ]’avocat général Fournier, si le législateur n'avait pas per mis, dans des cas comme qui nous oc cupe, la soupape du divorce; car d’aprèe ses auteurs, le divorce a 5té institué pour éviter les drames passionnels. Un ménage est désuni, l’un des époux manque à sea, devoirs, te divorce réglera ta situation. M Naquet nous l’a répété cent fois. Or, voilà que les ménages désunis se ré-, volvérisent comment avant le vote de la loi sur le divorce ; ils se révolvêrisent mê me davantage. Les époux ont beau être désunis et l’un d’eux trahir l’autre, si celui qui est trahi ne veut pas divorcer et préfère tirer sur la ou le rival, à quoi sert la loi qui permet le divorce ? Absolument à rien. Car « ne suffit pas de la permission du législateur, en l’espèce, il faut surtout la volonté des intéressés. Et voilà démontrée, une fois de plus, l’i nanité d’une loi dont ses auteurs disaient des merveilles. En tenant ce langage, nous sommes dans notre rôle, nous catholiques, qui n’avons cessé de blâmer le vote d’une loi destinée à désagréger la famille; mais que M. l’avocat général Fournier nous ait donné implicite ment. raison, qu’il ait montré le vide et le néant de œtte loi en ne la rappelant pas à l'héroïne du drame passionnel dont nous {tarions, voilà qui ne manque pas d’une ceraine saveur. C’est dans un cas semblable, ou jamais que ce magistrat devait rappeler à la fem me outragée qu’elle avait un tout autre...