Extrait du journal

chement dessinée, mettant ouvertement sur leurs gardes ceux qui sont menacés. Tout cela paraît trop compliqué pour le très grand nombre de gens qui ne voient dans la politique qu’un ensemble de manœuvres de couloirs n’ayant qu’un but : la conquête d’avantages matériels, jointe au plaisir, pour quelques-'uns sa voureux, de molester un certain nombre de leurs concitoyens. Il est donc entendu que les bouilleurs de cru sont des « gêneurs », et que, lors qu’on discute à leur sujet, le plus sage est de se désintéresser du débat. Et si beaucoup de députés ne semblent pas ab solument de cet avis, qu’on comprenne bien que c’est surtout la préoccupation électorale qui les tient, car les bouilleurs ont beau être encombrants et indiscrets, ce sont tout de même des électeurs, et des électeurs qui peuvent se venger d’une façon fort simple. Notez que, dans ce moment, les do léances des bouilleurs de cru n’ont rien d’excessif. On a voté, il y a quelques mois, une loi fort dure pour eux. Il est permis de supposer qu’ils la verraient, sans chagrin, abroger ; mais enfin, ils ne demandent, pour le moment, rien de semblable. Us voudraient simplement que, sous prétexte d’appliquer la loi, l’administration n’en aggravât pas les exigences déjà si onéreuses. Le débat qui vient d’avoir lieu à la Chambre des députés a mis en lumière, dans cet ordre d’idées, des fantaisies d’interprétation tellement scandaleuses, que M. Bouvier lui-même, point suspect cependant en l’occurrence, n’a pu rien contester, et a été contraint de promettre à la fois des réparations pour le passé et plus d’équi table modération pour l’avenir. A cet égard, le débat n’aura pas été inutile. Il est vrai que les promesses d’un mi nistre n’engagent guère son successeur et parfois pas même celui qui les a prises. Si les élections municipales n’é taient pas relativement prochaines, peutêtre eût-on été moins déférent aux pro testations, quelque légitimes qu’elles fus sent. On a donné cette fois aux bouilleurs quelques bonnes paroles, parce qu’ils avaient dans leur jeu un atout, qu’ils ne posséderont pas tou jours. L’échéance passée, on recom mencera peut-être à les tracasser et, s’ils se plaignent, on entendra de nou veau. au Parlement et dans les journaux, répéter l’exclamation : « Encore les bouilleurs de cru ! » Ernest Baudouin....