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Le Temps, 10 janvier 1894

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Le Temps
10 janvier 1894


Extrait du journal

LA RENTRÉE PARLEMENTAIRE La session ordinaire du Parlement s’ouvre, aujourd’hui même, dans le calme le plus com plet. Il faut que ce calme profite au travaillégislatif. La Chambre et le Sénat viennent d’être renouvelés; deux fois consulté, le pays a fait connaître ses vœux d’une façon explicite et pré cise. Il ne saurait plus y avoir d’hésitation ni de discussion sur la nature de la politique que ré clame l’immense majorité du pays. Deux ma jorités homogènes dans la Chambre et dans le Sénat, animées du même esprit, en sont les or ganes incontestables et irrésistibles. Les vérifi cations de pouvoirs sont finies au Palais-Bour bon ; elles ne. prendront pas beaucoup de jours au Luxembourg; en un mot, l’instrumèrit poli tique est tout neuf et tout prêt ; il n’y a qu’à le mettre en mouvement sur des sujets pratiques et qui intéressent la vie du pays pour faire une besogne suivie et utile. Il importe seulement de ne pas gaspiller le temps ; ce serait gaspiller et laisser s’éparpiller du même coup les forces et les bonnes volontés si laborieusement acquises et concentrées. Que la majorité se pénètre bien de cette idée qu’elle n’est pas là pour discuter académiquement sur des questions de politique transcendante ou sentimentale, dans lesquelles chacun obéit natu rellement à sa subjectivité personnelle, mais qu’elle est là pour agir constamment et prendre chaque jour des résolutions qui soient des actes politiques. Rien ne conserve l’union d’une majo-. , rité comme l’action commune, parce qu’elle en- ' gendre nécessairement la commune responsabi lité. Au contraire, rien ne l’altère et ne la perd comme les conversations platoniques et les dé bats inutiles. Que celle qui siège au PalaisBourbon se mette à l’œuvre le plus tôt possi ble. C’est son devoir et ce sera son salut. Naturellement, il faut bien qu’elle prenne le temps d’abord de constituer son bureau et puis de liquider les quatre ou cinq interpellations que lui a léguées la session extraordinaire. La première de ces opérations heureusement ne la retiendra pas longtemps. M. Charles Dupuy est sans concurrent pour le fauteuil présidentiel, et les choix des quatre vice-présidents-ne semblent pas devoir donner lieu à de plus grandes com pétitions. 11 est à souhaiter que les interpella tions annoncées ne traînent pas davantage en longueur. Sans doute, il faut respecter le droit d’interpellation ; mais il faut bien se dire que rien ne le déconsidère et ne le stérilise comme l’abus qu’on en peut faire et qu’on en a fait dans les législatures antérieures. Ce n’est pas la politique pure, ce sont les questions finan cières et économiques qui doivent nécessaire ment fournir le principal thème de la session qui commence. Et, dans cet ordre, que de graves problèmes vont exiger l’attention entière, et soutenue de nos députés 1 Dès samedi ou lundi prochain, le gouverne ment déposera, sur le bureau de la Chambre, un projet de loi sur la conversion du 41/2 0/0. Il faudra le discuter et discuter aussi l’affecta tion à donner au bénéfice que cette grande opé ration, si elle est bien conduite, laissera au Tré sor. Puis viendront le projet de budget de 1895, les réformes d’impôts qu’on a déjà étudiées et qu’il faudra faire aboutir, etc. Deux ministères nous prennent énormément d’argent. Au nom de la défense nationale, nous- avons, depuis vingt ans, donné sans trop compter, a la guerre et à la marine. Nous avons eu rai son de le faire. Mais le moment est peut-être venu de reviser de près le budget et la compta bilité de ces deux ministères. Si l’on veut trou ver des économies à réaliser, il est assez inutile de les chercher du côté des autres, qui sont à peu près réduits au strict nécessaire. Mais nous sommes fermement convaincus qu’on en trou vera dii côté que nous signalons. Seulement, il faut bien comprendre le genre d’études que cette révision exige. Elle doit être conduite de façon à ne rien compromettre des résultats ac quis dans l’organisation de la défense nationale. Pour cela, il faut autant de prudence et de mé nagement que de fermeté persévérante et scru puleuse. Les questions d’affaires, et surtout ces questions de longue haleine, ne se résolvent pas comme des questions de sentiment. Le parti pris impatient et brutal gâte tout sans remédier a rien. 11 convient donc que, se rendant bien compte, dès le début, de la tâche d’un genre très précis qui s’impose à elle, la majorité de la Chambre l’aborde avec un esprit libre et avec la décision fermement arrêtée de ne s’en laisser détourner par aucune des distractions bruyan tes de la politique abstraite. Les années qui viennent de s’écouler ont jeté un certain discré dit sur ce que l’on appelait jadis la politique d’affaires. Il est arrivé que, par un faux respect humain, on a ajourné les affaires du pays. Aujourd’hui, on est en retard presque avec toutes. 11 faut enfin — qu’on nous passe cette expres sion familière, mais énergique — il faut mettre la main à la pâte, traiter les questions de chiffres et d’intérêts généraux devant lesquelles la pu deur de nos politiciens transcendants affecte de reculer comme devant le péché. L’homme, sans...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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