Extrait du journal

ils sont instruits, plus ils s’exaspèrent alors aux difficultés de la vie. La disproportion chaque jçùr ressentie de leurs ressources et de leurs appétits, les poing comme un aiguillon ; ils pî-e'hnent en haine une société qui les ebpêche de satisfaire leurs convoitises. Les fausses théo ries et les déclamations des sophistes arrivent pour justifier par avance tous leurs actes, et les pires instincts, n’étant plus intérieurement réfrénés par la raison et le sentiment du bien, éclatent un beau jour en pillages, violences et assassinats. Si telle est la genèse de l’état d’esprit des jeu nes criminels, il n’est pas difficile d’en faire sortir la leçon et de la recueillir. Les vingt an nées que nous venons de passer ont été une longue crise. Nous avons réussi à émanciper l’éducation nationale de la tutelle de l’Eglise; mais nous n’avons pu atteindre ce résultat sans mettre en conflit les unes avec les autres toutes les forceapiorales dont l’équilibre et le concours sont nécessaires à l’éducation de l’enfant et à la santé du corps social. Ces forces, dans tout pays civilisé, sont au nombre de trois : l’inspiration scientifique, l’inspiration religieuse et la tradi tion des bonnes mœurs par la famille. Or, école publique, famille, églises, au lieu d’agir de con cert, sont divisées et en lutte intestine, si bien qu’elles perdent, à se combattre réciproque ment, les forces qu’il faudrait unir et diriger contre, l’ennemi commun. La vertu éducatrice de chacun de ces facteurs essentiels de la vie morale et-de l’éducation publique s’est trouvée paralysée et comme annulée. Quoi d’étonnant que les mauvaises leçons, pendant ce temps de guerre, aient été plus fortes que les bonnes, et que les passions mauvaises trouvant la porte ouverte se soient partout répandues ! Mais la crise ne peut durer toujours; ce n’est pas un état normal que celui où- les bons éléments semblent acharnés l’un contre l’autre pour s’af faiblir réciproquement ou se détruire. La guerre dc i’Eglise à l’école publique ne va pas sans blesser la science libre; celle de l’école contre l’Eglise, aveuglément poursuivie, aboutit à tuer la morale; et la famille, dans les deux cas, se trouve désorganisée et devient impuissante. Aujourd’hui, l’émancipation de l’école, qu’il fallâit atteindre, est chose acquise. Rien de plus urgent,-dès lors, que de faire succéder l’état de paix à l’état de guerre et de rallier au service du bien public toutes les forces vives de la so ciété, en les faisant sagement conspirer et colla borer à cette œuvre, délicate, laborieuse et pré caire qui s’appelle la formation de l’honnête homme et du bon citoyen....