Extrait du journal

IX il avait près de deux ans, l’autre. Et, à quel que temps de là, lorsque Angèle, son panier au bras, allait à la poissonnerie, la marchande ne manquait guère, après le pesage, de jeter dans la balance, par dessus le marché, un joli rouquier pas trop gros, une langouste mignonne, en disant d’une voix douce, l'œil plein de ca resse : — Tiens, pour le petit, ma toute bonne... Té, per îoupichoun, ma touto bouano! X « Un cri du cœur jaillit aisément, une pensée généreuse naît et s’exprime sans peine ; il est plus difficile d’agir en conséquence de ce cri, de cette pensée, avec suite et énergie. Le cri, c’est la bonne intention, qui suffit à balancer tout le poids du mal, comme preuve de l’existence du bien moral ; mais la réalisation humaine des héroïsmes n’est guère qu’un essai. L’héroïsme n’est qu’une minute, comme l’émotion créatrice dans l'amour... La conception du héros est peutêtre ce qui en a dégoûté les artistes. Le héros sans faiblesse m’est pas plus vrai que l’homme de génie sans défaillance. Et, s’ils étaient vrais l’un et l’autre, peut-être nous paraîtraient-ils, à nous, pauvres hommes, bien ennuyeux : ils se raient trop étrangers à nos faiblesses, à nos sottises, à nos vices même pour nous intéres ser. Nous leur reprocherions surtout d’être humiliants. Les intérêts et les passions ramènent les héros à la taille commune. Même on est un héros précisément parce qu'on s’élève une heure, une minute, malgré la résistance des passions et des intérêts, communs à tous. Un homme héroïquement bon pendant une . Reproduction et traduction interdites....