PRÉCÉDENT

Le Temps, 5 mai 1929

SUIVANT

URL invalide

Le Temps
5 mai 1929


Extrait du journal

- Les coups de feu qui, depuis deux nuits, tra versent les rues de Berlin ensanglantées par les menées communistes du 1er mai •jettent un trou de lumière sur lés obscurités des origines du mouvement révolutionnaire préparé, non pas seulement dans la capitale ^allemande, mais à Paris. A Berlin comme à Paris, des meneurs russes rprofflent leur silhouette la 'Veijle et le jour du 1" mai. À Berlin'comme à Paris, comme nous le faisons remarquer dans,notre Bulletin de l’étranger, l’influence occulte de Moscou se fait sentir, les ordres de. Moscou sont donnés. Les communistes allemands, les communistes français, qui géographiquement sont placés sur un territoire déterminé, mais qui politique ment relèvent de Moscou seul, doivent obéir. Les mêmes appels enflammés sont publiés le même jour à Berlin et à Paris. Durant des se-, maines, celles qui précèdent le 1er mai, les mêmes appels sont lancés dans la Rote Fahne (le Drapeau rouge) de Berlin et dans l'Huma nité de Paris : un titre vrai, un titre faux. Le Drapeau rouge, emblème du sang dont les communistes annoncent qu’il doit couler, le 1er mai, dans les rues. Lé Humanité, qui ment- à son titre : n’aime pas l’humanité qui, par ia guerre civile, veut tuer ses semblables. Il s’agit d’exalter d’avance les imaginations, de surchauffer d’avance les audaces. A Berlin comme à Paris, les communistes prétexteront du droit de réunion, du droit de cortège pour s’assembler en masse dans la rue. Une fois dans la rue, de paisible pour y descendre, la manifestation se fera violente pour s’y battre. Il faudra qu’il y ait des bagarres, des blessés, qui sait : « suprême espoir et suprême pen sée », des morts : comme à Berlin. Double avantage pour les communistes : ils mesure ront l’amplitude de leurs moyens, ils joueront aux martyrs. Ne disent-ils pas aujourd’hui, après un mois de provocations, que les me sures prises à Paris et en France pour les réduire à l’impuissance préalable, sont autant de provocations ? Répondre à une provocation certaine par une répliqué nécessaire, c’est, parait-il, d’après les communistes épaulés dans une union touchante par les socialistes, manquer à la règle du jeu. , À Berlin et à Paris, mêmes ordres venus de Moscou. Mais, à Berlin et à Paris, réfraction différente. A Paris, les ordres de Moscou ont été brisés net, parce qu’ils se-sont heurtés à des mesures préventives. A Berlin, ils ont reçu une exécution partielle, parce qu’ils n’ont fait surgir que des mesures répressives. Pourquoi? Parce qu’à Paris les pouvoirs publics sont purs de tout alliage socialiste. Parce qu’à Berlin le président du conseil, le ministre de l’intérieur, îe préfet de., police sont socialistes. Ceux qui refusent de voir que le socialisme n’a pas les mains libres en face du communisme; qu’il y a entre les deux partis pénétration et endos mose, que tous deux ont même origine marxiste, même doctrine marxiste, même but marxiste, que seuls — et pour combien de temps? -7- les moyens d’action diffèrent en core, ceux-là peuvent mesurer l’étendue de leur erreur au spectacle de Berlin. Le communisme, c’est le socialisme à l’ac célérateur. Le socialisme, c’est le commu nisme au ralenti. Mais tous deux se rejoignent. La révolution est leur terme commun. Le communisme, victorieux d’abord, noierait le socialisme dans le sang ou le chasserait, dans l’exil, comme en Russie. Le socialisme, s’il commençait par triompher, serait bien vite débordé par le communisme, comme en Rus sie. Par un engrenage d’un mouvement iné luctable, qui pactisé’ avec le socialisme pac tise avec le communisme. Qui ne voit au delà du socialisme le communisme comme terme fatal de l'évolution, de la révolution, pèche par portée de sa vue. Il a la vue courte. Vainement dira-t-on que ce sont lès auto rités socialistes qui, en ce moment, répriment l’émeute communiste à Berlin. Elles n’auraient pas éu à la réprimer si elles avaient voulu la prévoir, et, l’ayant prévue, la prévenir. Chez nous, à Paris, 3,000 arrestations préventives. Pas un mort, pas. un blessé. Une micjie,de pain aux incarcérés dans leur retraite/ pas une goutte de sang des passants, des agents, des manifestants dans la rue. Vingt-quatre heures d’immobilisation pour les uns — juste le temps de leur épargner la faute préméditée, de les protéger contre . eux-mêmes — le salut et la liberté pour les autres. Vaut-il mieux, comme à Paris, 3,000 arres tations préventives qui n’ont pas bien grave ment lésé ceux qui en ont été l’objet, ou 25 morts et 500 blessés comme on les comptait déjà hier à Berlin?...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

En savoir plus
Données de classification
  • schacht
  • gibson
  • briand
  • tardieu
  • duce
  • quinones
  • owen young
  • francqui
  • parmentier
  • adrien hébrard
  • berlin
  • paris
  • moscou
  • allemagne
  • russie
  • reich
  • italie
  • france
  • londres
  • belgrade
  • parlement
  • banque des règlements internationaux
  • académie de médecine
  • infor
  • foreign office
  • jeumont
  • parti communiste
  • fédération républicaine
  • la république
  • sorbonne