Extrait du journal

L'OMNIBUS gréviste (à un passant qui s'apprête à monter sur un omnibus): — "Vous n'avez pas honte ? Le passant. — De quoi ? Le gréviste. — De soutenir la Compagnie en favorisant les traîtres qui consentent à travailler... Vous n'avez pourtant pas l'air millionnaire, vous ! Le passant. — Si j'étais millionnaire, je prendrais un fiacre. . Le gréviste. — Alors vous, devriez être $yec nous. Vous devriez être avec tous ceux qui réclament aine augmentation de traite ment et qui se mettent en grève contre les ca pitalistes... Le passant, •-t- Vous êtes donc très mal payés à la Compagnie ? Le gréviste. — Oh ! là là ! Le passant. — Combien gagnez-vous ? Le gréviste. — Lisez les affiches! La Compagnie a eu l'audace d'afïicher ça ! Yoyez... . Le■ passant. — Six francs par jour... • Le gréviste. — C'est ignoble ! Et un jour de congé par mois.... Le passant. — Un jour payé ? Le gréviste. — Mais payé simple. Ce jourlà devrait être payé double. Et on veut qu'a vec six francs par jour nous nous nourrissionsy nous nous chauffions et'nous achetions notre tabac. Le passant. — Pardon. Six francs par jour, ça fait centre quatre-vingts francs par mois, n'est-ce pas ? . Le gréviste. — Tout juste ! . Le passant. — Eh bien ! moi, savez-vous pourquoi je vais prendre l'omnibus tout à l'heure et dépenser mes trois sous? C'est pour aller au ministère de l'instruction publique où je gagne cent vingt francs par mois, c'està-dire quatre francs par jour. Le gréviste (indigné). — Oh! Le passant. — Si mes parents m'avaient prévenu, j'aurais mieux aimé être conducteur d'omnibus... Le gréviste. — Mettez-vous en grève, il n'y a que ça... (Avec politesse.) Voulez-vous me permettre de vous offrir un petit verre ? GRAINDORGE....