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L’Écho rochelais, 20 septembre 1940

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L’Écho rochelais
20 septembre 1940


Extrait du journal

La Grande Inquiétude Coloniale par Pierre TAITTINGER, Député de Paris ’opinion publique française est, en général, mal renseignée sur ce qui se passe dans notre Empire colonial, et la rumeur tend de plus ce ^îus à remplacer l’information. Du drame qui se joue dans les Frances lointaines, on ne connaît guère que les légendes colportées dê bouche à oreille. Nous croyons de notre devoir de ramener à ses véritables proportions le malaise qui pèse éco nomiquement et moralement sur notre empire colonial. Parlons franc : L’Afrique du Nord a pu être, comme beaucoup d’autres, touchée par certaine propagande, mais dans l’ensemble elle est restée fidèle au Maréchal Pétain. Sous l’énergique impulsion du gouverneur général Boisson, il en est de même pour l’Afrique Occidentale Française. . Quelques taches sombres dans le tableau : des dissidences en Afrique Equatoriale, au Came roun, et principalement dans la région du Tchad. L’Océanie, les Nouvelles-Hébrides, la Nouvelle-Calédonie pouvant difficilement vivres seules, ont été amenées à accepter une domination anglaise, plus ou moins camouflée. Quelle est l’origine de ces difficultés ? Avant tout, et pardessus tout, l’éloignement de la Métro" pôle, le manque de marine marchande, et la sorte de « suggestion > dont ces différentes parties de notre Empire sont l’objet, de la part de la Grande-Bretagne. Nous sommes, en effet, dans l’incapacité présente de ravitailler nos possessions lointaines, et nous ne pouvons pas non plus recevoir par mer leurs produits, sans nous exposer à les voir confisqués par les bateaux anglais. Qu’on le sache bien, un soulèvement militaire n’est possible que lorsqu’il a en même temps l’appui des colons et des commerçants. * Dans certains de nos ports coloniaux les stocks s’accumulent, les marchandises se perdent, l’inquiétude est extrQne, et le Gouvernement de Vichy a peu de moyens pour remédier à cet état de choses. Aux termes des conventions d’Armistice, nous ne devions pas taire sortir de bateaux de nos ports coloniaux; cela eut été possible si l’Armistice n’avait duré que quelques jours, mais comme la situation présente est appelée à se prolonger pendant un certain temps, il est évident qu’il faut arriver à d’autres conceptions. Je sais avec quel cœur M. Devinât, un des hommes les plus au courant de nos besoins colo niaux, a exposé notre thèse à la Commission de Wiesbaden ; je sais d’autre part, que les autorités occupantes ont fait preuve, à cet égard, d’un large esprit de compréhension. Des mesures vont être prises, elles sont peut-être prises au moment où paraissent ces lignes, mais il est évident qu’il y a pas mal de temps perdu. Nous avions, au moment de l’Armistice, un excellent ministre des colonies, M. Rivière, socia liste unifié, et homme de confiance de M. Léon Blum. Il n’avait jamais tant entendu parler des colonies que le jour où on lui en a confié le portefeuille. Ne nous étonnons donc pas que les mesures qui auraient du être prises ne l’aient pas été, et que l’ou ait perdu de vue qu’il fallait avant tout pour nos colonies, vivre. Pendant des mois et des mois, on a donné, lorsque M. Mandel était ministre des colonies, des instructions impérieuses à tous nos représentants, pour collaborer étroitement avec les autorités mili taires et administratives anglaises. Les deux administrations, et les deux armées, devaient souder leurs efforts. Ne nous étonnons point qu il y ait eu une sorte de phénomène d’interpénétration entre Anglais et Français. D’autre part, les colonies n’ont pas suivi, comme nous autres dans la Métropole, certains drames récents qui ont eu leur point culminant à Mers el Kébir, et des événements, on ne sait là-bas que ce que veut bien en laisser paraître, en quelques mots, la T. S. F. Ayons le courage d’aller plus loin, et de reconnaître que certain hauts fonctionnaires de notre administration coloniale n’étaient pas à la hauteur de leur tâche. Naguère j’ai demandé à Monsieur le Ministre des colonies le déplacement de M. de Coppet, dont la présence à la tête de l’A. O. F. était indésirable, et j’ai sollicité de lui, sans en avoir été prié de quelque façon, la nomination de M. Boisson au poste de Gouverneur général. On s’est résigné, la crise étant venue, à confier un poste de commandement à ce grand admi nistrateur qui a été dans l’autre guerre, un admirable soldat... mais que de temps perdu 1 Lorsqu’on se décida à renvoyer de L’A. O F. M. de Coppet, on jugea indispensable de lui donner une compensation équivalente, en le nommant Pro-Consul à Madagascar 1 Pour quelles raisons M. Mandel agissait-il de la sorte ? Il voulait donner satisfaction à M. Léon Blum dont MT. Coppet étai* une des créatures. Il y avait à ce moment là, dans le haut personnel de nos administrateurs coloniaux, deux Gou verneurs inscrits régulièrement non seulement dans ces annales de la Maçonnerie, mais également dans les rangs du parti socialiste; Ils étaient cotisants, et participaient même aux Congrès du « Parti >. L’un s’appelait M. de Coppet, et l’autre était M. Brunot. On sait les avatars de M. de Coppet, qui finalement a été relevé de ses fonctions de Gouverneur Général, et qui a peut-être eu encore une com pensation diplomatique ou autre III Quant au Gouverneur Général Brunot, nommé an Commandement du Cameroun, c’est le Gou verneur phénomène qui a appelé, il y a quelques temps, les autorités Britaniques à la rescousse, leur réclamant par T. S. F., un bateau de guerre pour le protéger. A ce moment là le Gouverneur Général Noisson était en marche sur le Cameroun, pour remettre les choses en ordre... Le Gouverneur Général Brunot a été relevé de ses fonctions, mais si on voulait bien nous écou ter, et procéder aux épurations nécessaires, des incidents de ce genre ne se produiraient plus. La dissidence la plus importante a eu lieu dans le Tchad avec les colonels Leclerc et Larminat, qui ont fait cause commune avec les troupes Britaniques. Cette dissidence n’aurait pas été possible si on avait organisé plus tôt le ravitaillement de nos colonies, et permis à celles-ci d’expédier leurs produits sur la Métropole. Un nouveau Secrétaire d’Etat vient d’être placé à la tête du département des Colonies ; il s’agit du Contre Amiral Platon, peu connu dans les milieux coloniaux, mais qui doit être un Monsieur fort bien, puisque le Maréchal Pétain lui accorde sa confiance....

À propos

Lancé en 1828, le Journal commercial, littéraire et d'annonces judiciaires de La Rochelle donnait toutes les semaines des renseignements de première main sur les activités du port de La Rochelle. En 1829, il change de titre pour devenir L'Écho rochelais, mais reste fidèle à sa formule, amalgame de renseignements financiers de proximité et de bruits de couloir mondains. Le journal paraît jusqu'en 1941.

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