Extrait du journal

Le tente du traité conclu entre les puissances occidentales et la Suède est l’objet de l’examen et des commentaires de la presse française et étrangère. On s’accorde généralement à reconnaître que les consé quences de ce contrat seront beaucoup plus importantes que ne sembleraient l’indiquer au ^premier abord les termes dans lesquels il est conçu. D’une part, la Suède y trouve une garantie de protection puissante contre les empiétemens de la Russie qui , non con tente de lui avoir enlevé la Finlande , voudrait encore s’em parer d’un port sur les cotes de Norwège, et s’y créer une station d’où elle pourrait porter une grave atteinte aux intérêts maritimes des alliés. D’un autre côté -, les nations occidentales se trouvent ras surées par l’engagement que prend la Suède de ne céder à la Russie aucune portion de son territoire, de rejeter toutes scs offres , et de repousser à force ouverte toutes ses tenta tives d’envahissement. Au moindre mouvement de la Russie , à la moindre démons tration de sa part pour s’assurer un point d’appui sur les côtes de Suède et de Norwège, le traité se change immédiatement en une alliance offensive et défensive. Ainsi la Suède se trouve émancipée de la tutelle menaçante de la Russie ; le parti moscovite en Suède , qui aspire depuis longtemps à donner de solides annexes à la Finlande, voit ses espérances complètement déçues; les petits Etats d’Alle magne , jusqu’à ce jour indécis et timides , prendront, à l’exemple de la Suède , une allure plus ferme et plus décidée dans un sens favorable à la juste cause que les puissances occi dentales soutiennent avec courage et persévérance. Le traité du 21 novembre aura donc tout à la fois un grand résultat matériel et un puissant effet moral. 11 devient une barrière qui s’élève entre l’Océan et la Russie; peut-être en sortira-t-il bientôt une formidable batterie contre Saint-Pétersbourg. Toutes les nouvelles du Danemark font pressentir que ce dernier pays est sur le point de conclure avec la France et l’Angleterre, un traité qui aura pour bases les mêmes prin cipes de garantie territoriale que celui qui a été conclu avec la Suède. Des dépêches importantes sont arrivées de Berlin : l’une d’elles annonce que la Prusse appuiera auprès du Gouverne ment de Saint-Pétersbourg les conditions de paix qui lui m’ont été communiquées par l’Autriche ; l’autre nous apprend que la Russie se déclare prête à accepter la neutralisation de la mer Noire, moyennant certaines modilications admissibles et ré clamées par l’intérêt européen. La prise de Kars est le premier et l’unique succès que les Russes aient obtenu dans le cours de la campagne de 1855. Remporté sur une garnison affamée, mourant d’inanition , qui a fait des prodiges de courage et dont la persévérance a été poussée jusqu’à l’héroïsme, fait-il beaucoup d'honneur aux Russes? On peut se demander encore s’ils pourront conserver leur conquête lorsque la campagne se rouvrira au printemps prochain. Il est permis d’en douter ; peut-être même n’essaieront-ils pas de la défendre. Enfin le plus net du bénéfice qui résulte de leur conquête, ce sont les prisonniers tombés entre leurs mains; mais ils ont perdu, dans l’assaut qu’ils...