Extrait du journal

pour organiser « le parti français ». Une seule pensée animant une presse unifiée au-dessus des partis, et c est assez. La France est sauvée. En avant !... Halte ! C’est un commande ment qui en vaut un autre. On arrête la machine à penser de chaque journal, et on lui sert, chaque jour, la bonne cuisine des bonnes formules générales. Excellente intention. J'augure fort bien de ce système, qui nous libérerait de préoccupations trop vulgaires. Car j’imagine que les grands journaux, ayant déjà réalisé l’unité de leurs concepts, ainsi que chacun peut en juger en soupesant, chaque matin, le poids de leur énorme publicité, vont as socier à leurs marchés ces chemineaux de la presse : les journaux d’opinion ! Pauvres journaux d’opinion 1 Le “ peuple souverain » donne sa préfé rence à la souveraineté des grands pla cards de publicité. Que valent nos glo ses, auprès de la mise en vente des ru tilants soldes des grands magasins. On se plaint-, mon ami, de l’atonie de Vopinion publique dans un pays répu blicain où la presse d’opinion ne peut plus vivre. 11 ne nous reste que notre parti, et on nous propose de l’abandon ner. Que nous Restera-t-il, alors que nous serons dépouillés de l’austère de voir de défendre des idées moins pro fitables que des dépêches ? J’incline donc à penser, mon ami, qu il faut, d’abord, mettre de 1 ordre dans les affaires de la presse française. Nous nous occupons }des autres, cha que jour, et personne ne s’occupe de nous. La besogne faite, l’article écrit, nous rentrons au logis, non point pour goûter le repos des heureux de ce monde, mais pour travailler au livre- : roman, pièce, ou poème. La vie est in clémente au métier d’écrire. Détournez les rivières du beau fleuve qui passe, emportant vers le couchant le reflet de ses rives, et le beau fleuve, dans son lit trop grand, ne sera plus qu’un rivulet. On a détourné nos pensées ardentes •de la grande presse, qui les pouvait porter, et du grand public, qui devait les consacrer. Halte au désordre ! en effet. » Et Georges Ponsot m’a quitté, et j’ai écrit cet article inutile, tandis qu’en bas, dans la rue, essayant de dominer la foule mouvante, 1 agent continuait en vain à crier : « Halte au désordre ! Halte au désoiUre 1 » Pierre AUDIBERT. LE DÉBAT FINANCIER La collaboration avec le gouvernement...