Extrait du journal

C’est une semaine de croisade mystique qu'en don gratuit, la maréchale Booth vient de consacrer au peuple de notre cité. 11 était quelque peu folâtre de contempler sur les colonnes Mooris, le portrait de l apôtre voisinant avec l’affiche de La Beauté de Pans. Mais puisque la Maréchale fut parmi nous pour notre rénovation, cette rencontre pouvait pa raître un symbole sans mystère. Nous avons grand besoin, parait-il, d être ramenés dans le chemin des brebis retrouvées. Saurons-nous ne plus nous égarer, lorsque la .Maréchale nous aura de nouveau abandonnés ? Sait-on I Nous ne demandons pas mieux de croire à quelque beauté rayonnante réchauffant notre cœur las. Le chemin d’ici-bas n’est point semé de tant de roses que les rosiers de là-haut ne puissent nous tenter. Reste à savoir s’il y a vraiment des rosiers là-haut. Les croyances re ligieuses dont on prétend consoler nos déboires mortels, souffrent d’une telle imprécision à l’é gard de la situation exacte du parterre céleste, qu elles m inspirent des doutes sérieux. Heurtant, lasse ou meurtrie par l’existence, la femme éprouve l'attrait des rêves bleus et blancs de la foi. .Elle imagine ainsi apaiser l’inquiétude ancestrale, déroutant l’âme crain tive qu on lui a créée. Certains troubles venu» de «a chair ne font qu’aggraver sa mollesse à vouloir la vérité. Elle acceptera 1 amour cé leste. à défaut de 1 "amour humain. Le zèle de I évangéliste est une soit brûlante non apaisée. • ..... La Maréchale estime apporter cet apaise ment au monde fiévreux, blessé encore d’iAie large saignée. Dans un lyrisme ingénu, elle < écrie : —- V ivre comme vous vivez, ce n’est pas vivre. Ou plutôt c’est vivre comme un chou ou une carotte. • Hélas J non, Maréchale, nous ne vivons pas comme un chou ou une carotte. Ces excellents végétaux suivent leur destin à peu prés norraai*ti*ut. S ik pérment de mort tragique. «U •r-eww-aucimenwritt les artisans de lotir maltgtureuc ‘trépas. " Même en accordant aux hommes la. plu» grande indulgence, il est difficile de les acquitter- d une grande part de responsabilité dans leurs malheurs. Les femmes agiront mieux pour la sérénité du mende en les aidant à sortir dès ornières où ils s enlisent plutôt que d’adresser au ciel de* hymnes d’adoration passionnée. Certain jour, la Maréchale a rencontré.Jésus. F.!le I affame. Ce jour-là elle a donné poir toujours le trône de son cœur. Et le roi élu prit étrangement figure d'amant dans les élans j qu’elle eut vers lui. . l’ai soif de ta présence... j chante un des cantiques entonnés .par |a pieuse assemblée des Salutistes. Voici bien.l'écho de Tardent appel des sainte Thérèse prostrées sut le sol nu de leur cellule. Mais dès que le présence se refuse, quelle terrible rafale ravage I abandonnée. 1 ai connu une Salutiste ayant brusquement perdu la foi. naïve de la Maréchale.., Avant de conquérir le calme de la raison, elle subit de terribles luttes contre une croyance enracinée au plus profond de son être. Depuis, elle a’est faite la servante passionnée d'un ftonune, son j esclave. Amour pour amour. De ses mains diaphanes, la Maréchale Booth nous tend les roses de là-haut. Combien le plus petit églantier terrestre ferait négliger à maintes créatures déshéritées |e jardin des béatitudes promis par la pitié, en rançon de tant de dou leur injustifiée. Fanny CLAR....