Extrait du journal

LE tsar Ferdinand n'a pas une «bonne presse ». Tous tes journaux du monde — sauf, naturellement, les journaux boches — le jugent avec la dernière sévérité. Ils l'accusent de déinence, de duplicité et surtout d'ingratitude. Ils lui rappellent la dette sacrée des Bulgares envers les Russes, leurs libérateurs, et que, sans la campagne de Ï877 et le traité de San-Stefano, la Bulgarie vassale eût continué de gémir sous le joug ottoman. Ces choses, Ferdinand les connaît. Et comme, n'en déplaise à ses détracteurs, il est fort intelligent, il se rend compte de l'extrême gravité des résolutions qu'il vient de prendre. La défaite des trois empires alliés aura pour conséquence l'anéantissement politique de son peuple. S'unissant à eux, il épouse leur fortune, il joue le tout pour le tout. Ingrat, il l'est assurément, puisqu'il prête la main aux ennemis d'anciens bienfaiteurs. Mais l'homme, décidé à accomplir un acte déloyal, s'ingénie à trouver des raisons qui le justifient. Ferdinand ne peut nier l'immensité du service que la Russie rendit à la Bulgarie en la tirant d'esclavage. Seulement, il se dit, sans doute, que cette intervention des Russes poursuivait bien moins l'affranchissement des Bulgares que l'abaissement des Turcs, et que ces sauveteurs travaillaient, au fond, pour eux-mêmes. Il songe aussi que, personnellement, il n'est as leur obligé, et que son avènement au...