Extrait du journal

LE dernier des célèbres frères Davenport. vient de mourir. Ce nom évoque des souvenirs lointains et presque oubliés. ll est resté au fond de ma mémoire, entouré d'une auréole de mystère. Tout enfant, j'entendais parler de ces étranges personnages, raconter les miracles qu'ils opéraient en se jouant et qui excitaient, à cette époque (vers la fin du second Empire), une universelle curiosité. Ce qu'ils faisaient, d'autres l'ont refait depuis. Ils priaient un spectateur de leur attacher les mains, de les ligoter avec des cordes étroitement nouées. L'armoire où ils étaient assis se refermait; au bout d'un instant, elle se rouvrait; et l'on apercevait les thaumaturges débarrassés de leurs liens; ce phénomène s'accomplissait en présence d'un contrôleur de bonne foi, désigné par le public. lls l'attribuaient à l'intervention des esprits. Quelques-uns acceptaient cette explication; d'autres, plus sceptiques, la repoussaient. Personne net pouvant en trouver une meilleure, les frères Davenport restaient à l'état d'énigme. Robert Houdin essaya de dévoiler leurs « trucs », d'établir que ces prétendus médiums n'étaient que des prestidigitateurs ceptiorinellement adroits. Il ne parvint pas à détruire la légende formée autour d'eux. Le merveilleux attire et séduit la foule. Toujours, il en fut de même. L'antiquité révérait Tirésias. Le Paris du vingtième siècle regorge de devins et de pythies qui lisent l'avenir dans le marc de café, les cartes ou le blanc d'oeufs. L'époque où nous vivons est pleine de...