Extrait du journal

MES COMPAGNONS, vous tous qui êtes morts sous mes ordres, c'est à vous, nies frères souterrains, que je voudrais m'adresser du haut de ces montagnes qui trempent dans l'honneur du ciel. Ecoute-moi, Patricio Herriandez, "toi qui souriais avec tant de finesse derrière tes mains boueuses avant d'être ini cadavre, et toi, Ceferino Dominguez, mort aussi, qui faisais rire ton régiment en imitant les Espagnols de l'Estrama#doure, et. toi, caporal Cipriano Flores, mort aussi, toi qui étais presque nu sous les balles, et toi, nez camus, toi, menton fourchu, toi, petite moustache naissante, vous, lèvres fières de votre premier duvet et toi, regard bleu égaré sous ces tropiques et toi, et te', et toi, et toi, tous morts, vous tous qui n'aviez d'autre signe distinctif que votre intrépidité comme ces voltigeurs qui viennent de mourir gelés à la file indienne dans la montagne, c'est devant vous tous, mes petits, que voudrait comparaître un jour votre général, votre responsable. Il ne demande pas le pardon mais la justice dont vous avez maintenant le secret. C'est vous qui lui direz s'il mérite encore votre amitié ou si vous vous écartez à jamais de lui, par dizaines de mille, pour le punir par un silence éternel....