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L’assassinat du roi de Yougoslavie à Marseille

Le 9 octobre 1934, Alexandre 1er de Yougoslavie est assassiné dans la cité phocéenne. L’attentat, qui fait 4 morts et 7 blessés, aura d’importantes conséquences politiques et diplomatiques.

YougoslavieMarseilleGuerreOustachisPetite entêteentre-deux-guerres

Ecrit par

Michèle Pedinielli

Publié le

8 novembre 2018

et modifié le 24 février 2025

Image de couverture

Photographie de l'attentat de Marseille qui conduira aux décès du roi Alexandre de Yougoslavie et du ministre des Affaires étrangères Louis Barthou, Le Matin, 1934 - source : RetroNews-BnF

Le 9 octobre 1934, Alexandre 1er de Yougoslavie est assassiné dans la cité phocéenne. L’attentat, qui fait 4 morts et 7 blessés, aura d’importantes conséquences politiques et diplomatiques.

Le 9 octobre 1934, le roi Alexandre 1er de Yougoslavie débarque dans la ville de Marseille avant de prendre le train pour Paris avec Louis Barthou, ministre français des Affaires étrangères. Les deux hommes prennent place dans une voiture décapotée qui les emmène sur la Canebière.

Il est 16h15 lorsque le convoi officiel arrive au niveau de la Chambre de commerce. Un homme s’élance alors vers le véhicule en criant « Vive le roi ! »

« Mais, soudain, entre deux agents, un homme d'assez forte corpulence s'élança sur la chaussée. Il évita de justesse la monture du lieutenant-colonel Piollet ; celui-ci chevauchant devant la portière de gauche.

L'homme bondit sur le marchepied, un revolver à la main. Des détonations claquèrent. »

Le lieutenant-colonel Piollet, l’un des deux cavaliers qui chevauchent auprès de la voiture, réussit à porter deux coups de sabre sur le tireur. Celui-ci ne lâche pas son arme pour autant.

« Et plusieurs détonations claquèrent encore, jetant dans la foule une véritable terreur panique. Plusieurs personnes, dont un gardien de la paix, tombèrent.

Le chauffeur de l'automobile royale tira sur l'assassin, et ces détonations. accrurent encore l'émoi général. »

La confusion est à son comble. La foule et les policiers se précipitent à hauteur de la voiture. Ces derniers tirent à leur tour.

« La scène qui suivit fut effroyable les barrages furent rompus, la foule se précipita vers la voiture royale qu'entouraient déjà des policiers en civil, des agents, tandis qu'accouraient au galop de leurs chevaux, depuis le quai des Belges, les gardes mobiles. »

L’assassin est rapidement maîtrisé. Mais la police est impuissante devant la furie qui s’est emparée de la foule qui accourt.

« La foule hurla. Voyant l'homme au revolver à terre, des témoins se précipitèrent sur lui et le lynchèrent.

Des policiers empêchèrent les spectateurs d'achever le criminel qui fut transporté râlant dans un petit kiosque de police situé sur la place même de la Bourse, puis dans les locaux de la Sûreté, où il succomba peu après 19 heures. »

Le roi Alexandre de Yougoslavie et le ministre des Affaires étrangères Louis Barthou à Belgrade, L'Ouest-Éclair, 1934 - source : RetroNews-BnF

Le roi Alexandre de Yougoslavie et le ministre des Affaires étrangères Louis Barthou à Belgrade, L'Ouest-Éclair, 1934 - source : RetroNews-BnF

Il s’agit de Petrus Kalemen, plus connu sous le nom de Vlado Tchernozemski, ressortissant bulgare et membre de l’Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne (ORIM), groupe armé nationaliste redouté du sud des Balkans et fortement défavorable au régime de Belgrade.

Alexandre 1er est mort sur le coup. Le journaliste du Matin, présent sur les lieux comme beaucoup de confrères de la presse nationale et internationale, témoigne.

« Je me trouvais auprès de la voiture transportant le souverain lorsqu'elle s'arrêta sous la voûte de la préfecture.

Le malheureux souverain gisait sur la banquette, décoiffé, la poitrine trouée, son uniforme ensanglanté, perdant aussi le sang par la bouche. Il paraissait mort. Les officiers de sa suite et les policiers se précipitèrent. […]

Deux balles l'avaient atteint l'une dans la région du foie et était remontée dans la poitrine, l'autre du côté gauche de la poitrine. Des hémorragies s'étaient produites, mortelles. »

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À côté de lui, Louis Barthou a été touché au bras. Mais la balle a touché l’artère humérale et le ministre des Affaires étrangères se vide de son sang sans que les médecins ne puissent le sauver.

Le bilan de cet attentat est lourd : deux spectatrices dans la foule ont été fauchées par des balles perdues. Sept personnes sont blessées, dont le général Georges, présent dans la voiture du roi.

Cet acte sanglant glace l’opinion publique d’autant plus que la présence de caméras lors de ce défilé a permis de capturer l’attentat sur pellicule. Les Français découvrent – grâce aux actualités cinématographiques – le geste du tueur et le corps du roi défunt sur grand écran.

Les premières questions sur la sécurité du convoi apparaissent immédiatement.

« Mais l'attentat aurait-il été possible si une escorte avait encadré la voiture royale ?

Dans le cas même où cette précaution aurait été insuffisante n'aurait-il pas fallu, selon la coutume américaine, fournir au souverain une escorte spéciale de gardiens postés sur le marchepied de sa voiture ? »

Il semble qu’on ait volontairement laissé dégagés les abords de la voiture royale afin que la foule puisse contempler le souverain. L’événement étant d’importance (le nombre de journalistes présents en témoigne), il fallait que le roi soit visible de tous.

Cet attentat a trois conséquences immédiates.

L’émotion populaire et la pression diplomatique mettent une réelle pression sur l’enquête de police, qui va avancer vite. Sur le meurtrier lui-même, tout d’abord.

« Sur lui, on trouva un passeport de Zagreb, au nom de Pétrus Kalemen, commerçant, né le 20 décembre 1899 à Zagreb.

Des vérifications ont été faites immédiatement dans tous les services à la police spéciale, aux garnis, mais nulle part on n'a relevé le nom de Pétrus Kalemen.

Du reste, l'assassin n'était entré en France, par la gare frontière de Vallorbe, que le 28 septembre dernier, on peut conclure, de ce fait, que l'assassin n'est venu en France que pour commettre son forfait. »

Le terroriste nationaliste Vlado Černozemski, dit Kalemen en uniforme d'oustachi, 1932 - source : Collection Privée-Domaine Public

Le terroriste nationaliste Vlado Černozemski, dit Kalemen en uniforme d'oustachi, 1932 - source : Collection Privée-Domaine Public

On cherche en même temps des complices. La police réalise des descentes parmi les immigrés yougoslaves ou issus des Balkans soupçonnés d’appartenance à un quelconque mouvement révolutionnaire. À Thonon, deux complices de Kalemen sont arrêtés le 12 octobre, puis un troisième à Fontainebleau.

Ils appartiennent tous à l’ORIM, groupe terroriste tentaculaire partisan du regroupement des peuples macédoniens séparés à la suite de la Première Guerre mondiale entre Grèce, Bulgarie et Yougoslavie – et dont les membres ont notamment assassiné le Premier ministre bulgare neuf ans plus tôt.

Enfin, la conséquence diplomatique la plus importante est la fragilisation de la « Petite Entente » entre les États d’Europe centrale, Tchécoslovaquie, Yougoslavie et Roumanie, soutenue par la France en la personne de Louis Barthou. La presse craint une nouvelle période de troubles dans les Balkans et en Europe, après la guerre des Balkans au début du siècle et la dislocation de l’empire ottoman.

« De toute façon, le moins qu'on puisse dire, c'est que la disparition du roi Alexandre ne fortifiera pas la stabilité qui semblait, enfin, devenue le lot des Balkans.

Un enfant de 11 ans à la tête du jeune et fragile Etat, avec un conseil de régence, voilà qui ne laisse pas que de nous inquiéter à la fois pour l'unité yougoslave, et pour la tranquillité du Proche Orient. Alexandre disparu, c'est l'armature de la paix qui s'affaiblit dans ce coin de l’Europe. […]

Mais la perte est peut-être plus lourde de conséquences encore. M. Barthou et le roi Alexandre sont morts à la veille de ces entretiens de Paris et de Rome qui étaient susceptibles, en rapprochant la France et la Yougoslavie de l'Italie, de ramener un peu d'équilibre dans notre pauvre Europe affolée. »

L’enquête, qui va durer plus d’un an, montrera que Louis Barthou n’avait en réalité pas été atteint par les tirs de Kalemen, mais qu’il avait été touché par une balle perdue de la police. Elle prouvera également que l’opération avait été en outre financée par le funeste groupe d’extrême droite croate, qui se révélerait pendant la Seconde Guerre mondiale, les Oustachis.

L’échec de la Petite Entente conduira enfin la France à signer un pacte bilatéral avec l’URSS au mois de mai 1935.

–

Pour en savoir plus :

D. Yovanovitch, La Politique extérieure de la Yougoslavie, in: Politique étrangère, 1938

J.-B. Duroselle, Louis Barthou et le rapprochement franco-soviétique en 1934, in: Cahiers du monde russe, 1962

J.-F. Prévost, Les aspects nouveaux du terrorisme international, in: Annuaire français de droit international, 1973

Mots-clés

YougoslavieMarseilleGuerreOustachisPetite entêteentre-deux-guerres
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Ecrit par

Michèle Pedinielli
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