Interview

La vie dans la ville : la rue, de l'Antiquité à nos jours

Jour de neige rue de la Fidélité, dans le 10e arrondissement à Paris, Agence Rol,1922 - source : Gallica-BnF

Flâneurs, badauds, marchands, piétons, cyclistes, révolutionnaires, policiers, bourgeois et prolétaires : tous arpentent les trottoirs et axes routiers du tissu urbain. Conversation avec l’historienne Danielle Tartakowsky au sujet de la rue et de son imaginaire.

La rue, avec sa chaussée et ses trottoirs bitumés, ses feux rouges et ses passages piétons, nous est tellement familière qu’elle en est presque devenue invisible. Cinq historiens se sont penchés sur son histoire, pour en retracer les héritages anciens et les ruptures majeures. Entretien avec Danielle Tartakowsky qui a dirigé l’Histoire de la rue, De l’Antiquité à nos jours, co-écrite avec Joël Cornette, Emmanuel Fureix, Claude Gauvard et Catherine Saliou.

Propos recueillis par Alice Tillier-Chevallier

RetroNews : Plutôt que d’envisager la ville dans sa globalité comme le font les histoires urbaines classiques, vous avez souhaité descendre à l’échelle de la « rue ». Pourquoi ce prisme ?

Danielle Tartakowsky : La rue est très présente dans les réflexions contemporaines, notamment chez les architectes et les urbanistes, qui insistent notamment sur son importance dans la création du lien social. C’est cette rue telle que nous la connaissons aujourd’hui que nous avons voulu inscrire dans la longue durée, non pas pour montrer que rien n’a jamais changé, mais pour en dessiner à la fois les héritages et les décrochements successifs : car s’il y a indéniablement des éléments de ressemblance, la rue d’aujourd’hui n’est certainement pas celle de Pompéi.

C’est bien dans l’Antiquité que sont posés les cadres matériels, mais aussi conceptuels qui vont marquer durablement les urbanistes. S’ensuit une longue phase de déclin urbain après la chute de l’empire romain, puis une renaissance des villes à partir du Xe siècle. On peut alors parler, comme l’a proposé Claude Gauvard dans l’ouvrage, d’un « long Moyen Âge de la rue » : car les continuités trouvent leur prolongement jusqu’au XIXe siècle et même au-delà – d’une certaine façon jusqu’aux lotissements des banlieues des années 1920 ou même certaines rues de New York encore aujourd’hui.

Dans le même temps, l...

Cet article est réservé aux abonnés.
Accédez à l'intégralité de l'offre éditoriale et aux outils de recherche avancée.